Après 20 ans, Jean Ping reconnait la victoire de Mba Abessole face à Omar Bongo

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Mba Abessole le sait. Les Gabonais connaissent parfaitement ce qui s’est passé à l’issue de cette élection-là. Pas besoin d’en faire un dessin

Plus qu’une révélation pour les jeunes générations, ces propos de l’ex-confident du défunt Omar Bongo démontrent les pratiques politiciennes où le mensonge est la matrice. Jean Ping est donc ferme : « Il faut créer une nouvelle République pour développer ce pays».

Très serein, gestuelle présidentielle, traditionnellement vêtu,… l’ex-président de l’Union africaine nous reçoit dans son domicile situé à proximité du Lycée français Blaise Pascal. Il est 9h ce samedi de la fin du mois de novembre. Confortablement assis, il lance : « Les Gabonais sont très intelligents. Il manque à la tête de cette nation un vrai patriote capable de mettre en avant l’intérêt général ».

Jean Ping, est-il cette personne providentielle ? Lecture !

Propos recueillis par Zogo Laroma

Jean Ping, que doit-on retenir du premier meeting du Front de l’opposition pour l’alternance le 23 novembre 2014 à Port-Gentil ?

Je crois qu’il faut faire un certain nombre de constats. Le premier, c’est que le stade était comble. Je crois que nous estimons à 25 000 personnes le nombre de ceux qui ont participé au meeting du 23 novembre. Lorsque vous regardez le stade Pierre Claver Divoungui de Port-Gentil, vous avez de chaque côté de la tribune 6500 personnes. Au milieu, on ne sait pas, les deux parties du stade remplies représentaient à elle seule 13 000 personnes avec le milieu disons 13 500. Sur la pelouse, il y avait au moins autant si ce n’est plus. Vous voyez donc que nous sommes autour de 25 000 participants. Vous conviendrez avec moi que c’est énorme pour une ville comme Port-Gentil.

Espériez-vous un tel succès ?

Vous savez, le Gabonais a compris les enjeux du moment, le Port-Gentillais encore davantage. La situation très catastrophique de notre pays incite chaque citoyen au sursaut républicain. C’est vrai, au début, nous ne nous attendions pas à un tel succès. Mais, le meeting a explosé. C’était un très grand succès. Merci beaucoup à Port-Gentil !!!

Le deuxième constat…

Contrairement aux appréhensions des uns et des autres, il n’y a eu aucun débordement, aucune casse. Dès la fin du meeting, les participants qui étaient échaudés sont rentrés tranquillement chez eux. Nous avons organisé un diner chez moi pour recevoir ceux qui étaient venus de Libreville et tout s’est passé merveilleusement bien. On a même dû improviser un bal avec orchestre au cours duquel nos invités ont dû apprécier les morceaux choisis de quelques jeunes artistes de la province.

En résumé ?

Nous avons assisté à un grand meeting, la première sortie du Front à Port-Gentil a connu un grand succès et il faut bien le souligner, dans le calme et pas de casse. Nos compatriotes de Port-Gentil on fait mentir cette réputation de casseurs et de brûleurs que l’on veut bien coller à ses habitants, et je ne peux que m’en réjouir. Mais cela veut aussi dire qu’on peut parfaitement maîtriser nos militants.

Nous avons demandé aux autorités locales d’encadrer le meeting pour éviter tout débordement. Ce que la gendarmerie et la police ont fait avec beaucoup de doigté. Les gendarmes et les policiers nous ont encadrés à la sortie du stade. Ils ont dû arrêter la circulation pour permettre aux véhicules de sortir sans trop de difficultés et aussi aux participants de regagner tranquillement leur domicile. Ce fait, rarissime dans l’histoire des manifestations de Port-Gentil mérite d’être signaler. Disons que nos compatriotes des forces de l’ordre ont compris l’urgence de se mettre au service des citoyens. Bravo !

Aviez-vous l’intention de faire une marche ?

Nous n’avions aucune intention de faire une marche. Nous avons simplement constaté que M. Yves Fernand Mamfoumbi, vient avec l’argent de l’Etat, paye des jeunes pour venir faire des marches de soutien à qui vous savez. Ce monsieur et sa bande de jeunes corvéables à merci ont le droit de faire les marches à Port-Gentil, nous on n’a pas ce droit. Nous n’avons pas demandé à faire une marche. Mais, pendant que nous parlions de l’avenir du Gabon au cours de notre meeting, parallèlement, M. Aperano, le maire de la Commune de Port-Gentil et M. Ababé organisaient des manifestations à coup de millions pour détourner les participants de notre rencontre. Au final, il n’y a eu que quelques enfants de 14 ans à 17ans et c’était un fiasco total.

Ces comportements sont-ils dignes d’une République qui se respecte? Et que dire du traitement par les médias de cette sortie ?

Ces manifestations n’honorent pas leurs initiateurs et c’est bien triste pour ne pas dire pathétique. A propos justement des médias, je voudrais ici rendre un hommage appuyé aux journalistes de TV+ qui ont pris le courage de venir à Port-Gentil couvrir cette grande rencontre. Vous savez comme moi que nous n’avons pas droit aux medias publics pourtant payés par les contribuables que nous sommes. Ces medias sont réservés au seul pouvoir qu’ils encensent en permanence. Dans un pays qui se veut démocratique on ne fait pas ce genre de choses. Les medias d’Etat sont devenus des medias privés ou les ordres viennent d’en haut. Je crois que ces pratiques anti-démocratiques ne sont plus acceptables au 21e siècle.

L’Union a dit…

(Interruption sèche) S’il vous plaît, pouvez-vous passer à la question suivante ?

Je reviens à ma question par rapport aux publications du journal L’Union.

Nous sommes à La Loupe. Parlons entre les personnes dont l’objectivité est la matrice, évitons de nous égarer. Vous êtes quand même à La Loupe !

Il se dit que vous voulez créer le chaos dans le pays.

Vous avez vu qu’à Port-Gentil aucun chaos n’a pas créé même si nos adversaires s’attendaient à ce que survienne ce chaos pour justifier leur sempiternelle brutalité. Tout s’est plutôt passé dans le calme. N’est-ce pas là une preuve de force ? Le rapport de force est plus que jamais en notre faveur, nous avons fait une véritable démonstration de force sans violence. Quand les soi-disant émergents font les marches à travers le pays, ils cherchent principalement à montrer qu’ils ont du monde derrière eux. Malheureusement à Bitam et ailleurs, c’est un flop. Il y a donc tout lieu de se réjouir en constatant tout simplement que la légitimité est de notre côté.

Selon certaines rumeurs, vous auriez demandé aux agents de la SEEG de couper l’eau et le courant à Libreville et ses environs.

Que des balivernes ! Que des galéjades ! Nos compatriotes exerçants dans cette société apprécieront l’injure, le mépris d’un régime dont le mensonge, la calomnie restent le mode de gouvernance. Depuis 2009, Ali et ses amis pillent éhontément les ressources du pays. Conséquence, les sociétés ne sont pas payées et les investissements ne se font pas. En quoi l’opposition serait-elle responsable de la mauvaise gouvernance du pays ? En quoi l’opposition serait-elle responsable des coupures intempestives de l’eau et de l’électricité à Libreville et ses environs ?

Jean Ping, ne va-t-il pas être un Mba Abessole en version métissée ?

Je pense que comparaison n’est pas raison. Entre ce qui s’est passé en 90 et ce qui se passe aujourd’hui, il y a une très grande différence. Vous constatez qu’aujourd’hui, tous ceux qui étaient de l’autre côté au PDG et dans ses partis alliés ont quitté le bateau. Plusieurs hautes personnalités qui étaient encore hier au PDG ont quitté le bateau et ont basculé dans l’opposition.

Ce n’est pas le cas de 1990. Le père Mba Abessole n’était pas de la majorité. Il venait de l’extérieur. Il venait défier le régime. Il venait gagner les élections que d’ailleurs il a gagnées. Ce qui n’est pas notre cas. Nous étions au pouvoir. Nous avons définitivement quitté le PDG. Nous n’avons pas quitté le PDG pour y revenir 15 jours après en catimini. C’est impossible et retenez-le une fois pour toute.

Vous signez et persistez que Mba Abessole a gagné les élections contre Omar Bongo en 1993?

Mba Abessole le sait. Les Gabonais connaissent parfaitement ce qui s’est passé à l’issue de cette élection-là. Pas besoin d’en faire un dessin.

Compaoré vient d’être chassé du pouvoir par la rue…

Nous sommes au 21e siècle. On n’est plus au 20ème ou encore au 19e siècle. Il y a des réalités politiques qui existaient au 19e siècle ou au 20e siècle : les partis uniques. C’était le règne des partis uniques en Afrique. C’est fini, c’est complètement fini. L’Afrique va nécessairement se démocratiser. Elle va nécessairement répondre aux aspirations du peuple. La souveraineté du peuple sera respectée. Donc pour ceux qui croient qu’au 21e siècle qu’ils vont entrer dans l’histoire en reculant, en revenant en arrière…ils perdent leur temps. Ils ne pourront pas s’en sortir. Ils se condamnent eux-mêmes à s’auto détruire. L’histoire est en marche, personne ne pourra l’arrêter.

Le Gabon peut-il connaître une situation à la Burkinabè ?

Je crois que les situations ne sont pas comparables. Mais il y a des similitudes. Vous comprenez que le peuple burkinabé ne voulait plus du président Blaise Compaoré. Mais le peuple s’y est opposé et ce qui est arrivé là-bas peut aussi arriver ailleurs.

Voulez-vous faire partir Ali et conserver le système Bongo ?

Si Ali part et que le système demeure. Rien n’aura changé. Ce n’est pas la peine que l’opposition cherche à venir au pouvoir pour venir faire exactement ce qu’Ali fait en ce moment. Il est hors de question d’instaurer une nouvelle dictature pour remplacer l’ancienne. Ça ne sert à rien, Ce serait de la comédie. Nous ne sommes pas dans l’opposition pour faire de la comédie. Nous sommes une opposition d’alternance et cette alternance-là doit nécessairement aller jusqu’à l’éradication du système actuel. C’est le défi historique que l’opposition gabonaise est condamnée à relever.

Que comptez-vous faire, une fois au pouvoir ?

Nous commencerons par tout mettre à plat pour changer le système actuel afin de créer une nouvelle République et nous mettrons en place la Démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance. Nous allons en même temps créer les conditions institutionnelles, juridiques et politiques qui favoriseront le développement économique, sécuriser l’environnement des affaires pour que la confiance nécessaire revienne. Nous tenons beaucoup à la sécurité juridique et judiciaire qui sont les conditions essentielles d’un développement serein.

Notre engagement dans ce sens ne souffrira d’aucune complaisance. Notre pays doit être mis aux standards internationaux qui le hissera au rang des grandes démocraties, nous sommes engagés dans ce sens. D’ailleurs, si vous lisez la déclaration du Front qui a été faite le 19 Juillet dernier, elle comporte deux parties. Une grande partie consacrée à la critique du système actuel et vers la fin vous trouverez l’esquisse du projet de société que le Front veut mettre en place.

Et pourtant Bilié-Bi-Nze dit que vous n’avez pas de projet de société…

Je ne répondrai pas à cet individu décidemment très prolixe et tristement célèbre. J’invite tout simplement nos compatriotes à lire cette déclaration pour mieux la comprendre ; c’est dans ce sens que nous avons, au cours de notre sortie à Port-Gentil, pris la peine de distribuer cette déclaration sous forme de « Lettre » à nos compatriotes pour qu’ils se l’approprient. Il ne suffit pas de répéter à chaque passage à la télévision, « vous n’avez pas de projet de société ».

Il y a belle et bien dans cette déclaration du front un esquisse de projet de société, un projet de programme. Une fois que le Front aura choisi son candidat, puisqu’il s’est engagé à choisir son candidat unique, ce candidat va, sur la base de ce projet de société, le détailler. Le moment venu, la brochure de ce projet sera disponible et en ce moment-là l’individu auquel vous faite allusion pourra venir pérorer là-dessus.

Le Représentant spécial de l’ONU vient de lancer un appel au dialogue…

C’est le rôle du Représentant spécial de l’ONU d’appeler au dialogue. Est-il besoin de rappeler que l’ONU a été créée pour maintenir la paix dans le monde ? Donc que le Représentant des Nations unies en Afrique centrale, son excellence M. Abdoulaye Bathily, que je connais personnellement, lance un appel pour le dialogue, Il est dans son rôle. Simplement, il faut dire que pour danser le tango, il faut être deux. Donc pour faire un dialogue, il faut être deux.

Qu’est-ce qu’Ali Bongo fait, il se contente d’humilier les Gabonais, de les mettre en prison, de les accuser de tous les mots. Il ne cherche pas le dialogue. Donc je crois que cet appel au dialogue s’adresse plus à lui qu’à nous. Nous n’envisageons pas le dialogue parce nous croyons qu’il ne cherche pas le dialogue. Il cherche peut être à gagner du temps mais pas le dialogue, ce n’est pas dans son ADN. Dans vos colonnes, son parent Philibert Andjembe le décrivait comme cruel. Vous comprenez cela ? C’est grave si à la tête du Gabon se trouve un personnage dénué de tout humanisme.

Que reprochez-vous à Ali Bongo ?

L’homme, en lui-même, est un vrai condensé de ce qu’il y a de pire pour un peuple aussi docile, aussi compréhensif que le peuple gabonais. Il incarne la violence sous toutes ses formes, la démagogie, le mépris de la souffrance des Gabonais, l’accaparement de toutes les ressources du pays, l’arrogance, le déni de l’autre au bonheur… Ce monsieur a un comportement aux antipodes de ce que nous savons du Gabonais et de son histoire.

N’êtes-vous pas là dans les incantations ? Pouvez-vous citer des exemples ?

J’espère que vous êtes, encore, avec moi ! Allons-y alors ! Dans quel pays un chef de l’Etat ferme tout un Ministère plus d’un an durant ? Si ce n’est pas là, une obsession sanguinaire de détruire l’autre, les mots n’ont pas de sens pour tout le monde. Ali peut-il expliquer pourquoi, dès qu’il est arrivé au pouvoir, sa première action a été de faire la chasse aux sorcières.

A cet effet, tous les proches de l’opposition sont limogés et poussés à s’asseoir à la maison. Plus grave, sans aucune décision de justice, il a suspendu les salaires de ses compatriotes du gouvernement parallèle de Mba Obame alors même qu’ils sont en activité. Il a créé des agences pour mieux écrémer les ressources du Gabon.

Depuis 2009, il ment comme il respire. Tous les projets lancés par lui sont au point mort. Il dilapide l’argent des Gabonais pour le culte de sa personnalité à l’international. Aux ministères des Affaires étrangères, plusieurs de mes anciens collaborateurs ont été virés pour « intelligence avec l’ennemi ». Et pourtant, qu’énonce la Constitution dans son article 1er alinéa 7 : « Chaque citoyen a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de son sexe, de sa race, de ses opinions ». Est-ce qu’un président de la République dont la structure mentale est équilibrée peut-il cautionner le piratage des journaux ? C’est une honte.

On retrouve là toute la critique inscrite dans la déclaration du Front.

Exactement. Vous dirigez le pays et vous vous entourez d’une légion étrangère composée de mafieux. Une horde de profito-situationistes sans foi, ni loi dont le seul objectif est de s’enrichir coûte que coûte. Face à cette humiliante et insultante vérité, Ali Bongo et ses amis allèguent de la xénophobie du Front de l’opposition. Ce n’est pas de la xénophobie. Croyez-vous qu’au Benin, au Sénégal ou ailleurs, on acceptera qu’un Gabonais dirige et pille l’un de ces pays comme Accrombessi le fait avec nous ? Qui va l’accepter ? Personne. Alors il ne s’agit pas de xénophobie.

Tous ceux qui composent le Front ne sont pas xénophobes. Certains d’entre eux, comme moi, nous avons des parents, un père d’origine étrangère. Nous sommes mariés à des Ouest-africaines. Nous avons dans nos familles des métis qui sont Gabonais et Ouest-africains. Surtout les côtiers, comme moi. Donc il ne peut pas s’agir de xénophobie. Il s’agit de dire tout simplement que chacun doit être à sa place. Et je crois que nos compatriotes qui vivent en bonne intelligence avec nos frères étrangers le comprennent bien et je vous dirai que même chez nos frères Ouest-Africains, cette vérité est bien comprise.

Si Ali Bongo ne veut pas dialoguer, qu’allez-vous faire ?

Lorsque vous ne laissez à l’opposition que la rue. Lorsque l’opposition n’est pas représentée au Parlement. Lorsque l’opposition n’est représentée nulle part. Ni dans les instances locales, comme ça se faisait au temps de Bongo père. Que voulez-vous que l’on fasse ? Lorsque les médias sont confisqués, que reste-il aux exclus des médias qu’ils financent pourtant avec le fruit de leur travail ? (Elévation du timbre vocal) Il n’y a que la rue ! (Visage fermé) Il ne reste malheureusement que la rue ! C’est Ali Bongo qui pousse les Gabonais à aller dans la rue. Ce n’est pas nous, c’est lui.

Le 13 novembre dernier, vous étiez au-devant de la marche. Êtes-vous prêt à être des martyrs pour l’avènement d’une nouvelle République ?

(Ton ferme et le doigt levé). Ecoutez, Ali Bongo doit comprendre qu’il a en face de lui des Gabonais déterminés à restaurer la dignité des Gabonais bafouée par lui. Je vous le dis aujourd’hui et pour toujours : je suis prêt au sacrifice suprême pour laisser aux Gabonais un pays digne d’envie. Une nation où il fait bon vivre. Moi, je ne joue pas avec les mots. Je parle franchement. Tenez, ouvrez votre Constitution en son article 1er alinéa 21 : « Chaque citoyen a le devoir de défendre la patrie…. ». Le Gabon est en danger. Mon rôle est de le défendre.

Ali Bongo, pour conserver son pouvoir, est-il capable de monstruosité ?

(L’air inquiet, mais regard déterminé). Bien sûr, bien entendu. Vous savez qu’il cherche à m’éliminer physiquement, ou m’emprisonner pour que je ne sois plus éligible.

En quoi faisant ?

En faisant n’importe quoi. En cherchant paraît-il à me faire empoisonner, à m’accuser que je détiens des armes ici. Alors que je n’en ai pas. Ils arriveraient avec une voiture ayant des armes à l’intérieur, m’interpellerait et dirait que ce sont mes armes. Moi, Jean Ping, je n’ai pas d’armes. Je n’en ai jamais eu et je n’aurais jamais d’armes chez moi. Si c’est ce piteux prétexte qu’ils sont en train d’élaborer, l’opinion nationale et internationale doit savoir que c’est de la simple provocation. On arrête des gens, on les accuse de détourner des fonds, je crois sincèrement que ce sont des méthodes du passé, des méthodes qu’il faut absolument rejeter.

Vous qui avez connu Ali Bongo dans le passé, le pensez-vous capable d’autant de cruauté ?

Je ne pense rien. J’observe la cruauté. Je n’ai pas besoin de penser, j’observe la cruauté tous les jours, même vis-à-vis des siens, surtout quand on voit la manière dont il traite les siens. Je dis et je le répète, si Ali Bongo avait la capacité de détenir, depuis son palais, le robinet de l’oxygène il l’aurait fermé pour que le Gabon et les Gabonais disparaissent. C’est vous dire de quoi l’homme est capable de faire pour jouir en paix des ressources du Gabon.

Aujourd’hui, je constate qu’il recherche – en s’appuyant sur Ali Akbar Onanga – le naufrage collectif avec les Altogovéens. Mais, il se trompe. Tous les Gabonais ont compris que les compatriotes du Haut-Ogooué vivent les mêmes problèmes que tout le monde. Sa cruauté est connue des Altogovéens. C’est pourquoi, ils ne sont pas enthousiastes depuis 2009. Ils ne reconnaissent pas ce monsieur, comme étant réellement un des leurs.

Lorsque, coup sur coup, vous humiliez Jean Pierre Oyiba, Patrice Otha, François Banga Eboumi, Léon Paul Ngoulakia, Egide Boundono, Idriss Ngari, Marcel Abéké, Jean-Pierre Lemboumba Lepandou…pour faire plaisir à Maixent Accrombessi, à quoi devriez-vous vous entendre ? Nous avons lu la déclaration de Philibert Andjembe dans votre journal. Philibert Andjembe est un Batéké originaire de Bongoville, la ville où Ali, par le fait du prince, était député. Si vous voyez qu’il réagit comme ça ! C’est une réaction qui est partagée par beaucoup de gens du Haut-Ogooué.

Pensez-vous que le Gabon arrivera en 2016 sans effusion de sang ?
(L’air inquiet) Ecoutez, je me pose de plus en plus de questions…

Et qu’allez-vous faire ?

Attendez, ne soyez pas pressé. J’en viens. Nous voyons de plus en plus que les Gabonais ne veulent pas aller en 2016. Ils nous le disent clairement : « Nous ne voulons pas aller en 2016, parce qu’il va tricher…» et ils s’opposent très souvent aux mots d’ordre de calme que nous lançons. Ils s’y opposent. Ils ne veulent plus d’Ali Bongo et de sa légion étrangère. Et si nous n’arrivons pas à trouver les moyens pour maîtriser la rue, c’est la rue qui va nous maîtriser. Et les conséquences, dans ce cas de figure, sont connues.

Craignez-vous cette éventualité ?

Mais écoutez, le pays ne marche plus. Il y a des grèves partout. Là où les gens étaient les soutiens du régime : finances, douanes, régies financières, c’est la grève permanente. Rien ne marche plus, le pays est en panne. Il n’y a plus d’argent et donc les gens ne sont plus payés. Bon, que voulez-vous ? Nous sommes dans une situation, comme on disait autrefois, « prérévolutionnaire ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est un constat, que quelqu’un récemment m’a indiqué en disant : « est ce que vous ne pensez pas, que nous sommes en situation prérévolutionnaire ? », j’ai réfléchi longtemps avant de lui répondre et je lui dis : « Si votre analyse conduit à une telle situation, compte tenu de tout ce que nous voyons partout, j’ai le sentiment que si nous n’y sommes pas, nous n’en sommes pas loin ».

Alors, vous allez lancer le mot d’ordre pour l’assaut final, comme au Burkina ?

Allons d’abord à Paris…

Vous ne répondez pas à ma question.

Pouvez-vous, s’il vous plaît, me poser la question suivante !

Oui ou non Ali Bongo est-il un enfant adopté ?

Pour vous, la question se pose ?

Vous avez déposé la plainte contre Ali Bongo. Que comptez-vous faire pour la suite ?

Vous voyez, la plainte a quand même pour objectif de prendre à témoin la communauté nationale et internationale. Il y a sans aucun doute un faux établi par le maire du 3ème arrondissement. C’est un faux, c’est indiscutable que c’est un faux. Une première plainte concernait donc l’établissement d’un faux par les autorités du 3ème Arrondissement. La deuxième plainte, concernait l’usage de faux. Quelqu’un a établi un faux et il a été utilisé.

C’est Ali Bongo qui a utilisé le faux. Ça ce sont des faits. Ce ne sont pas des inventions, quel que soit de qui vous êtes le fils. A partir de ce moment-là, c’est grave. La troisième plainte venait de l’UPG, qui évoquait le fait que le président est chargé de faire appliquer la Constitution. S’il l’a violé, quel que soit le moment, il passible de la Haute cour de Justice, qui décide de destituer celui qui a violé la constitution alors qu’il est chargé de veiller sur son application. Donc ces trois plaintes sont en cours.

Ne craignez-vous pas les dés soient pipés d’avance, parce que la Justice est aux ordres dans notre pays ?

Je ne vous laisserai pas humilier davantage les Gabonais. Que voulez-vous dire par là ? Que ces compatriotes sont dénués de tout sens patriotique ? Qu’ils ne sont pas citoyens dignes de confiance ? Non, moi j’ai foi en l’Homme gabonais. Je parie sur sa capacité à servir les intérêts supérieurs de la nation. Attendons donc de voir avant d’insinuer ceci ou cela. Dans tous les cas, cette démarche se poursuivra sur le plan international.

Que s’est-il passé le 13 novembre, le jour du dépôt de cette plainte ?

Le front a demandé aux Gabonais de l’accompagner pour aller déposer la plainte contre Ali Bongo. La marche ne faisait même pas deux kilomètres dans un quartier où il n’y a rien à casser. Nous avons même pensé que les forces de l’ordre encadreraient la marche. Mais grande a été notre surprise de constater qu’on nous a empêchés de la faire. Il y a eu des violences, mais nous avons quand même réussi à déposer la plainte.

Nous avons correctement et républicainement été bien reçus. Comme quoi, on aurait pu éviter tout cela. Pourquoi tant de violence de l’Etat ? Une violence disproportionnée, par rapport à 400 ou 500 marcheurs, qui accompagnaient pacifiquement leurs leaders. Pourquoi tant de frilosité, pourquoi tant de violence inexpliquée ?

Le pouvoir semble être aux abois et a même peur de son ombre pour agir de telle manière. Vous avez pu constater la différence entre Libreville et Port-Gentil. Port-Gentil avait 25 000 personnes, il n’y a rien eu, parce qu’on nous a laissés nous exprimer librement. A Libreville, on a utilisé les gaz lacrymogènes, la violence alors qu’il n’y avait même pas 500 manifestants, même pas. Allez y comprendre, allez y comprendre ! Que s’est-il passé dans leurs têtes ?

Pensez-vous qu’Ali est aujourd’hui prêt à laisser le pouvoir ? Selon vous que cache son comportement, a-t-il peur de la Cour Pénale Internationale ?

Je crois qu’il se préparait, d’après ce que nous avons appris, à tirer sur les manifestants. En se disant que les Gabonais sont des peureux, après deux ou trois morts, ils vont reculer. Ils allaient tirer. Ils se sont dit qu’après 500 ou 600 morts, ils vont reculer.

Ils ont oublié que maintenant, il y a la CPI et que ce phénomène-là, relève de la responsabilité de protéger les citoyens par les autorités en place. Ça veut dire que malgré sa souveraineté, si un pays ne veut pas protéger sa population, ou pire encore, participe à maltraiter ses propres citoyens, l’extérieur a le droit d’intervenir, la justice internationale a le droit d’intervenir. Ali Bongo devrait bien réfléchir avant d’agir.

Le chef de l’Etat vient de lancer le dialogue social avec les partenaires sociaux…

5 ans après sa rocambolesque prise de pouvoir, il se souvient de l’existence des partenaires sociaux. Non, il est dos au mur. Il cherche simplement à gagner du temps. Depuis 2009, les différents Premiers ministres n’ont-ils signés des accords avec les syndicalistes ? Pourquoi le peuple devrait-il croire à la mascarade actuelle ?

Vous prônez la libération du Gabon…

Cela ne veut pas que nous voulons être contre les étrangers. Je vous le répète, nous ne sommes pas des xénophobes. Mais nous voulons purement et simplement libérer notre pays. Que ce soit contre la légion étrangère ou ceux qui les ont appelé pour travailler avec eux. Il faut libérer le pays.

Quel message lancez-vous à vos compatriotes ?

Mes compatriotes savent et comprennent ce qui se passe. Eux tous veulent libérer le pays, parce que les Gabonais sont humiliés. Ali Bongo a humilié le peuple gabonais. Jusque dans les villages, les gens se demandent : « Mais, qu’est-ce que nous avons fait au bon Dieu pour qu’on nous emmène trois ou quatre bandits qui viennent de je ne sais où pour diriger notre pays. Ce n’est pas possible, qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? ».

Donc les Gabonais se disent simplement que notre pays doit être libéré. Nous avons eu aussi une période coloniale et les Africains se sont libérés de la colonisation et du joug colonial. Je pense qu’aujourd’hui, les Gabonais veulent se libérer de la mainmise du pouvoir actuel, qui est antinational, qui n’aime pas les Gabonais, qui les humilie à chaque fois, qui pille le pays et ça ce n’est pas acceptable.

Je dis donc aux Gabonais et cela en chœur avec mes compatriotes du Front de l’opposition : « Préparez-vous pour la libération de notre pays. L’heure est proche ! ».  

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