Antoine Bodjona: Il était pauvre, il est mort pauvre!

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C’est la patte des « Grands Hommes ». Elle consiste à ne pas regarder du côté où se trouve l’or du monde et les privilèges de la vie. Et Antoine Bodjona a laissé cette patte à la postérité, à la jeunesse naissante togolaise. La dernière fois que je voulais une interview avec le « Vieux combattant », cela remontait en octobre 2010. Il était alité mais avait accepté de nous accorder une interview au Lynx. La fièvre était forte, le corps qui a connu toutes les humiliations et les brimades lâchait. Mais, le « Grand  Nationaliste » avait voulu parler pour la dernière fois avec l’animal qui voit Tout. Il nous lisait et me fit comprendre qu’il aimait cette manière de parler comme si on allait jamais mourir au Lynx. Dans ma vie de journaliste, il y a des signes que je n’ai jamais su lire, que je n’ai jamais pu décortiquer le message. De Feu Agbobli Atsutsè,  au journaliste camerounais, Puis Ndjawé, il s’est passé des derniers coups de fil qui ne trompent pas ! Je pris soins d’envoyer un journaliste du Lynx à son domicile pour s’enquérir de l’état de santé du plus connu de la famille Bodjona. Le même soir j’appelai chez lui. Il toussait et me parlât d’une forte fievre. Je lui fis comprendre que l’interview pouvait être ultérieurement faite, si sa santé n’était pas reluisante. Le vieux me fit savoir en riant que la « mort n’avertit pas mon fils ». Je t’enverrai tout ce que je pense du Togo et de mon fils avant de partir. Je crus à une blague.  Bien réconfortant, le journaliste du Lynx me rassura  que le « Vieux » était encore fort et avec un physique qui rassure.  Je pris soins d’appeler de nouveau et il me fit même un signe : « Quand tu mettras pied au Togo, moi je n’y serai plus ! »

« Mais, aies dans ta tête, que ce n’est pas de l’Allemagne que tu construiras le Togo » la phrase de trop ! Pour moi qui croit toujours que Faure m’attend pour me faire la peau… Le protocole d’interview atterrira avec les réponses à la rédaction du journal Lynx et  nous fîmes surpris que l’homme n’avait pas manqué de rappeler à son fils cette sagesse fracassante de la vie : «Quand on accède à un poste de responsabilité on doit s’attendre à le quitter un jour car dans cette vie tout passe, le bien comme le mal ! Et quiconque se construit sur le cadavre du prochain doit s’attendre tôt ou tard à subir le même sort. Pascal ne l’ignore pas et le prénom Akoussoulèlou  qu’il porte le dit si bien et s’adresse à ceux qui pour accéder à une place ou à un poste qu’ils convoitent ont recours à des manigances, à des intrigues voire à des manoeuvres sordides de basse besogne pour renverser ou sauter celui qui l’occupe  »

Une carrière bien remplie avec des ronces et des trahisons comme reliquat pour une lutte héroïque ! Une lutte au service du Togo, une vie menée de bout en bout pour les Valeurs. Quand son fils Pascal et certains loubards de la milice du HACAME pavanaient déjà avec des voitures tout terrain dans les années 1990 à Lomé, et fêtaient jusqu’au petit matin dans sa villa sise à Attikoumè, le vieux regardait  de la fenêtre de sa petite maisonnette la pègre sans vouloir s’y approché. Il était nationaliste, il n’avait jamais revendiqué une autre culture politique à part la souveraineté de son pays. Gilchrist Olympio et ses lieutenants qui avaient combattu l’homme au soir de sa vie, sont finalement passés s’asseoir à table avec le fils de leur bourreau, alors que le nationaliste disait de le caresser dans le sens du poil, histoire de le dépouiller du trop de prérogatives qu’il avait dans les mains. Brave Combattant, Paix et Amour pour toi ! Fait-nous l’honneur de dire aux pères de l’indépendance et surtout à Sylvanus Olympio que rien n’a changé sous le soleil au Togo. Depuis 1967 ce sont les Gnassingbe qui règnent en maîtres, n’ai pas honte pour un peuple qui a depuis démissionné, de le dire à Sylvanus, le héros national de notre indépendance.

Toute l’équipe Lynx  adresse ses condoléances à la famille Bodjona et surtout au ministre et fils du défunt, Pascal Akoussoulelou Bodjona.

Camus Ali Lynx.info

Lire l’interview avec le Lynx

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