Alger-Paris: la pomme malienne de la discorde

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Paris a justifié l’intervention militaire française au Mali en faisant valoir que celle-ci a été décidée dans le respect de la légalité internationale. Argument en béton auquel rien n’est opposable de la part des acteurs régionaux nourrissant de la prévention contre la participation étrangère à la région dans une action militaire destinée à aider les autorités maliennes à réinstaurer leur souveraineté sur le nord de leur pays.

Il est d’autant inattaquable que l’intervention française a été sollicitée avec empressement par ces autorités maliennes légitimement effrayées par l’avance des groupes armés en direction de Bamako qui aurait été irrésistible sans cela. L’Algérie ne pouvait dès lors émettre son opposition à l’initiative française en ne lui reconnaissant pas le caractère légal tel que défendu par les autorités françaises. Elle aurait ce faisant engagé un combat diplomatique avec la France perdu d’avance.

Mais si Paris donne l’impression de jouer sur du velours en ayant mis la légalité internationale de son côté, il va néanmoins très vite apparaître qu’elle devra compter avec les réticences régionales et celles de l’Algérie en particulier que suscitera la présence prolongée au nord du Mali de sa force d’intervention. Paris le sait apparemment, ce pourquoi elle presse et les Etats de la CEDEAO à dépêcher la sienne et le Conseil de sécurité de l’ONU pour qu’il donne à celle-ci les moyens logistiques et financiers en rapport avec sa mission.

L’Elysée et le Quai d’Orsay ne cessent de souligner que la présence au Mali de la force d’intervention française ne sera pas immuable, conscients en cela que même légale elle provoque de la défiance quant aux buts pour lesquels elle aurait été décidée. Celui de la lutte contre le terrorisme et les narcotrafiquants qui mettent en péril l’existence en tant que nation du Mali, n’inspire pas grande confiance au camp des opposants à l’intervention extra-régionale. A ce titre, Paris n’échappe pas au soupçon d’avoir décidé d’agir au Nord-Mali avec un agenda dont la lutte contre le terrorisme international n’est que le prétexte cachant des visées ne tenant compte que des intérêts d’Etat de la France.

L’Algérie n’a pu que prendre acte de la tournure prise par les événements au nord du Mali. Elle ne pouvait en l’état des choses s’afficher ostensiblement contre l’intervention française en interdisant par exemple le survol de son territoire aux avions français qui y participent. Il n’en demeure pas moins quelle s’estime en droit d’avoir son mot à dire sur les développements que va prendre cette intervention d’autant que la logique de la stratégie militaire mise en œuvre par ses promoteurs fait se rapprocher de sa frontière le terrain des combats.

Pour l’heure, les autorités algériennes observent une ligne de conduite respectueuse de la légalité internationale même si la pertinence de la décision qui en a découlé dans la crise malienne ne leur apparaît pas évidente. Paris aurait tort de mésestimer le rôle d’acteur régional clef de l’Algérie et d’ignorer son point de vue pour ce qui touche au problème de la région du Sahel. La visite d’Etat effectuée par François Hollande est censée avoir ouvert la voie à des relations algéro-françaises basées sur la confiance. La façon dont Paris a imposé la vision française sur la crise malienne ne manquera pas de montrer les limites des pas réalisés dans ce sens.

Alger rumine sa déconvenue et s’astreint pour l’instant à laisser faire, mais elle réagira au moindre dérapage qui surviendra dans la poursuite de l’intervention militaire en cours au nord du Mali. Elle a déjà pris date en réaffirmant avec insistance qu’elle s’en tient toujours et avec plus de conviction à l’option de la solution politique. Laquelle reste pour elle la seule viable pour un règlement définitif de la crise malienne dont la cause déclenchante ne fut pas la présence au nord du Mali des groupes armés terroristes et narcotrafiquants mais la faiblesse de l’Etat malien et son incapacité à faire vivre entre elles et en toute égalité de droits et de chances les populations du Mali.

Kharroubi Habib

Palestine-solidatité

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