Nicolas Sarkozy, en déclarant que l’Africain n’était pas encore rentré dans l’Histoire, décrit bien l’envers du décor : une habile propagande à long terme, destinée à prouver aux bons français que les africains sont restés immatures
Bonjour! Les internautes africains souhaiteraient vous connaître, parce que vous intervenez souvent en faveurs des Africains, dont le président Laurent Gbagbo qui est kidnappé par l’oligarchie militaro-économique occidentale. Qui êtes-vous ?
Abel Shlomit : Je suis Shlomit Abel, une femme qui à l’automne 2010 a brusquement pris conscience de ce qui se tramait en Afrique, et s’est particulièrement engagée aux côtés de la Côte d’Ivoire digne et agressée par la France et la fameuse communauté internationale.
L’Afrique, à coup sûr, défraie la chronique, depuis l’assassinat de Kadhafi par les mêmes occidentaux, pas plus tard qu’hier, le Mali a été envahi par les islamistes, En Centrafrique, la situation ne s’améliore pas. Qu’en dites-vous?
A vues humaines, on ne peut être que découragé et affolé par l’accélération des mises en place de conflits, d’agressions, de divisions de territoires. La France et les États-Unis rivalisent pour dévaliser ce qui reste à dévaliser en Afrique, précipitant les populations dans la misère et le chaos afin qu’elles n’aient plus les forces de se défendre, de croire encore à une indépendance possible. A une époque je prenais le temps de suivre les conflits un peu partout, maintenant c’est impossible, c’est trop, c’est trop lourd; ajoutez à cela l’Ukraine et tous les otages de cette politique qui vise à renverser Poutine pour arriver au gaz russe, et bien sûr la Syrie, l’Iran. Il y a de quoi pleurer, le nazisme c’était il y a 70 dix ans, mais finalement ses vertueux condamnateurs ont fait et font bien pire, en vouant à la destruction des peuples, des continents entiers: inavouables héritiers d’Hitler, ces occidentaux-là sont au dessus de tout soupçon, parce qu’ils se retranchent derrière l’épouvantail du nazisme, en s’en servant comme alibi !
Vous êtes d’origine israélienne, mais vous avez, vous et votre mari évolué pendant plus de 20-30 ans ailleurs, en France exactement. Que pensez-vous des relations entre la France et les pays africains surtout francophone?
Originaire de France, je suis devenue israélienne en 1995, date à laquelle nous avons choisi avec mon mari et nos quatre enfants de nous installer à Jérusalem et de partager le destin du peuple juif sur cette terre de toutes les promesses. Vous savez, je suis restée culturellement pleinement française, alsacienne plus exactement pour ceux qui relèveront la nuance, et je souffre doublement de voir la France se comporter en état voyou, comme je souffre de voir Israël, mon pays fermer les yeux et soutenir la politique du grand frère américain.
C’est à travers la crise électorale ivoirienne et mon désir d’en savoir davantage sur l’imposition du franc CFA à toute l’Afrique de l’Ouest, -soit 14 pays- que mes yeux se sont ouverts à l’automne 2010. Qu’un pays à peine sorti au printemps 1945 de la guerre, avec à sa tête un héros national comme le général de Gaulle, ose mettre en place une tutelle de ses colonies plus musclée encore que celle imposée par l’Allemagne à la France, alors qu’il a refusé le plan Marchal des Etats-Unis, flairant le piège de la dépendance à venir, et ce à Noël 1945, quel cadeau empoisonné ! à l’origine je crois que 80% des montants des transactions africaines restaient consignées dans les banques françaises ! Et ce franc CFA imposé à tous les pays sous tutelle qui ne peut être utilisé en commun par tous les pays d’Afrique de l’Ouest, comme aujourd’hui l’Euro dans la communauté européenne!
Une fois envolées les illusions sur mon pays, un pays que j’aime, je porte évidemment sur tous les événements de l’actualité un regard différent: par exemple sur le choix du tout nucléaire, qui n’a rien d’idéologique, mais est uniquement lié au fait que la France paie l’uranium à 5% de sa valeur… ce qui est triste, c’est que les gouvernements successifs -droite et « gauche » confondues- ont bradé des pans entiers du bien public au profit d’une privatisation à outrance.
Les français ne connaissent pas l’histoire vraie des relations avec l’Afrique, ne ressentent même pas l’injustice dont elle est victime, parce qu’ils paient très cher leur électricité: ils sont eux-mêmes devenus les otages des lobbys financiers qui tiennent le pays dans leurs nasses. Nicolas Sarkozy, en déclarant que l’Africain n’était pas encore rentré dans l’Histoire, décrit bien l’envers du décor : une habile propagande à long terme, destinée à prouver aux bons français que les africains sont restés immatures, incapables, voire indignes de prendre en mains leur destin, tout juste bons à dépendre des subventions extérieures, inaptes à transformer et commercialiser eux-mêmes leurs ressources -cacao, minerais, pétrole etc… De grands enfants qu’il faut encore et toujours assister !
Quand j’étais étudiante, -il y a de cela plus de 35 ans- je me souviens que mes camarades africains ne parlaient jamais de ce qu’ils vivaient, alors qu’ils en auraient eu l’occasion, en dénonçant ouvertement les travers de la France; mais c’était tabou : leur unique ambition était souvent d’épouser une française, pour ne plus avoir à quitter ce grand pays pourtant responsable des souffrances ou des carences les ayant contraints à s’exiler. Même si cette forme singulière du syndrome de Stockholm est loin d’avoir disparu, on a aujourd’hui affaire à une nouvelle jeunesse fortement conscientisée, fière d’être africaine, comme cela se voit dans les costumes et les coiffures; même en Israël, depuis quelques années, les éthiopiennes se font moins défriser les cheveux, optant pour des petites tresses, devenues à la mode chez les beaucoup de jeunes israéliennes non africaines.
Le conflit Israélo-palestinien est celui qui n’a jamais eu de solution , mais, pourquoi d’abord l’existence d’un tel conflit, car ailleurs, les conflits ont pour cause lointaine ou immédiate: les richesses du sol ou du Sous-sol. Qu’elle est le véritable problème qui créé autant de morts dans cette partie du monde?
Comme en Afrique, ce conflit israélo-palestinien est un conflit créé de toutes pièces par l’Occident afin d’assurer son contrôle sur les ressources pétrolifères de la région. Malheureusement pour beaucoup d’africains, ils préfèrent la doxa française classique : « les victimes d’hier sont les nazis d’aujourd’hui », et pleurent sans savoir qu’ils sont téléguidés par le même occident qui les polarise sur les pauvres palestiniens « génocidés » ! Savez-vous que le nombre des victimes musulmans du conflit israélo-palestinien représentait en 2007 0,3 % de l’ensemble des musulmans tués dans le monde depuis 1950 : 31 000 sur 11 millions et demi. Sur ces 31000, 19000 étaient palestiniennes.
A ce jour, on déplore du côté palestinien la mort de 21000 personnes en l’espace de 66 ans, de 1948 à 2014; sur ces 21000 victimes, au moins 2300 ont été tuées par les leurs; d’ailleurs, les statistiques palestiniennes incluent toujours les victimes d’assassinats internes : pendant la dernière guerre de Gaza, le Hamas a éliminé à deux reprises plus d’une vingtaine de gazaouis qui avaient osé crier tout haut leur ras le bol; une cinquantaine de morts évidemment comptabilisés sur le dos d’Israël… Du côté juif israélien, pendant la même période -1948-2014-, 25655 personnes ont perdu la vie, dont 2500 dans des attentats terroristes. Il est urgent que les Africains comprennent le rôle d’opium du peuple joué par la surenchère médiatique autour de ce conflit, pour mieux étouffer leurs velléités de révolte face aux génocides à répétition – bien réels ceux-là – qui ensanglantent leur continent : rien qu’en République démocratique du Congo, les menées souterraines de l’Occident ont entraîné la mort de plus de 7 millions de civils en moins de trente ans ! Le paradoxe, c’est que dans ce domaine, les humanistes les plus zélés des gauches européennes bruyamment pro-palestiniennes s’avèrent être les alliés les plus efficaces des exploiteurs de l’Afrique.
Pour en revenir à Israël, je dirai simplement que ce pays possède sans doute l’armée la plus civilisée de l’histoire contemporaine et universelle; une armée au sein de laquelle toute infraction aux droits de l’homme est punie avec la dernière sévérité; une armée qui ne bombarde aucune cible sans avoir prévenu par tous les moyens possibles la population concernée; une armée qui, pendant les dernières semaines du récent confit à Gaza, est allée jusqu’à risquer la vie de ses soldats sur le terrain pour aller inspecter les bâtiments visés, de peur qu’ils n’abritent des boucliers humains, comme ces handicapés retrouvés enchaînés dans un bâtiment à haut risque ayant servi de base de lancement de missiles. Je suis fière de la manière dont mes enfants se sont comportés lors de leur service militaire et leur période de réserve. Quand des africains, trop rapidement, lisent des rapports tronqués ou rapportés par des sources volontairement avilissantes, j’ai mal, parce que cette armée d’enfants de 18 à 21 ans est justement tout, sauf une armée de tueurs, et le fait de les comparer aux FRCI et autres rebelles ivoiriens est à la fois grotesque, absurde, stupide et douloureux.
Pour ce qui est du plan de partage de la Palestine, il suffit de regarder la carte pour comprendre tout de suite qu’il est le fait de décideurs soit incompétents, soit volontairement cyniques. Après les larmes d’émotion versées en 1948 – au lendemain d’une Shoah dont le nombre de victimes est aujourd’hui évalué à 7 millions, suite aux recherches du Père Patrick Desbois sur les fosses communes d’Europe de l’Est –, et dans le sillage authentiquement généreux de quelques croyants sincères comme Lord Balfour, militant pour la création d’un foyer national qui mettrait les Juifs à l’abri sur les lieux où vécurent leurs ancêtres, il est clair que le seul désir des maîtres d’alors était de disposer d’une tête de pont totalement occidentalisée dans cette région stratégique : tête de pont suffisamment sûre pour protéger les intérêts occidentaux, mais suffisamment fragile pour ne jamais pouvoir s’affranchir de leur tutelle. La continuelle alimentation du conflit n’avait d’autre but que d’entretenir la fragilité d’Israël tout en permettant sa survie. Alors qu’au départ, la création d’Israël donnait l’impression aux croyants – Juifs, chrétiens et même musulmans, comme le roi Abdallah de Jordanie, arrière-grand-père du roi actuel – que les promesses divines étaient en marche, tout à été fait pour que le déroulement des événements vienne déraciner cette espérance, et pour qu’aux yeux de tous le conflit se réduise à une insoluble équation politique.
Je crois qu’Israël a sa place dans la région, et que la résurrection de l’état d’Israël correspond aux prémices de l’accomplissement d’un projet sur-humain; la condition de réussite d’un tel projet, c’est qu’Israël ne perde pas de vue sa vocation éternelle : devenir un instrument de paix et de prospérité pour tous les peuples qui l’entourent, et à terme pour les peuples du monde entier. Et ne me dites pas qu’il y a loin de la coupe aux lèvres : les Arabes d’Israël sont d’ores et déjà, et quoi que l’on en dise, les Arabes les plus heureux de la terre : plus heureux que ceux de Tunisie, de Libye, d’Égypte, du Mali, de Syrie, d’Irak, autant de pays bénéficiant à des titres divers du traitement de faveur de la communauté internationale; plus heureux même que ceux d’Arabie Saoudite, du Qatar ou des Émirats, dont les immenses richesses ne profitent qu’aux riches, et non aux armées d’esclaves qui symbolisent leur asservissement matériel et moral à l’Occident.
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