Quiconque veut chercher à appréhender le drame que vit le peuple togolais depuis des décennies doit d´abord connaître la nature du régime qui préside aux destinées de ce pauvre pays.
La fonction principale de tout régime politique normal est de mettre en place un programme de gouvernement qui aille dans l´intêrèt des populations pour lesquelles il est là.
On peut ajouter que dans un système démocratique le pouvoir que détient un chef d´état ou un gouvernement appartient au peuple qui a un droit de regard et de contrôle sur les actions de l´autorité suprême.
Et beaucoup de pays en Afrique dirigés pendant longtemps par des régimes de dictature essaient depuis plusieurs décennies avec des fortunes diverses d´entrer dans une ère démocratique.
Notre pays le Togo n´était pas resté à l´écart de ces mouvements « révolutionnaires » qui ont vu le jour un peu partout sur le continent noir. Et c´est ainsi que depuis le 05 Octobre 1990 les populations togolaises du Nord au Sud luttent pour un peu plus de liberté et de démocratie.
Si dans cetains pays d´Afrique le passage à la démocratie s´est déroulée sans grands heurts, les togolais et leur opposition buttent depuis plus de deux décennies sur un régime qui n´entend pas partager le pouvoir de façon sincère, ou moins encore le céder.
Certes, l´échec cuisant enregistré par les forces démocratiques après tant de décennies de lutte, est dû en partie aux ego des uns et des autres. Les défections, les trahisons de toutes sortes qui ont plombé et qui plombent encore l´élan du peuple vers sa liberté, n´auraient pas été possibles si tous ceux qui se disaient démocrates avaient mené comme un seul homme le même combat.
Mais il serait malhonnête de réduire les raisons de notre tâtonnement dans le processus de démocratisation au Togo à la seule faute de l´opposition.
Les Togolais ont la malchance d´être dirigé par une bande de hors-la-loi qui ne veulent pas entendre parler de démocratie.
Au moment où les Togolais se trouvent à la croisée des chemins de leur histoire et après une multitude de dialogues politiques qui n´ont rien donné, le moment n´est-il pas venu de situer les responsabilités dans la descente aux enfers de notre pays?
Et malgré la gymnastique que peuvent faire des analystes intêressés en essayant d´avancer des arguments contraires, le piétinement de la démocratisation avec tout son corollaire de souffrances pour le peuple togolais est à mettre sur le compte du manque de sincérité, de la mauvaise foi, et d´une grande dose antipatriotique du pouvoir en place.
Il faut vraiment savoir qui est le RPT-UNIR, quelles sont ses structures, comment il fonctionne, avant de savoir à qui on a affaire.
Le RPT ou UNIR n´est pas un parti politique comme les autres, c´est un ramassis d´ennemis du peuple togolais, profiteurs égoistes de la dictature, de l´injustice et du népotisme.C´est un tonneau sans contenu. Tous ceux qui se disent du RPT-UNIR n´ont aucune conviction politique, ils y sont par cupidité, par méchanceté et non par passion de faire de la politique.
Si on est amoureux de la vie humaine, si on lutte pour les principes de justice et d´égalité, si on est sensible à la misère et aux souffrances de toutes sortes du peuple togolais, on ne va pas au RPT.
Un regroupement d´arrivistes et d´opportunistes sans coeur que constitue le RPT-UNIR ne peut pas être le lieu rêvé pour la culture de bonnes vertus. C´est un lieu où la dignité et la respectabilité ont déguerpi depuis longtemps, et c´est pourquoi il n´est pas étonnant d´y retrouver des personnages comme Soli Toki Esso ou Barry Moussa Barqué qui, bien conscients du mal fait au peuple, continuent à défendre l´indéfendable.
Pour tout comprendre sur ce nid d´intrigues appelé RPT lisons plutôt un passage du livre du feu Me Siméon Kwami Occansey, “Si Eyadéma m´était conté… »
« Le RPT est un véritable monstre qui manie dans sa bouche les vertus les plus louables du monde et brandit dans ses mains les principes les plus odieux du gouvernement qui ont pour nom le mensonge systématique, le mépris total de la vie humaine, l´injustice sauvage et aveugle, le militantisme dans l´unique but d´obtenir quelque privilège, le détournement des biens de l´état avec arrogance et, pour courronner tout cela, la jalousie acerbe avec la méchanceté induite qui signifient tout le bohneur pour soi et la destruction des autres. Le RPT, présenté à sa création comme un parti rassembleur, une grande école de vertus civiques, ayant pour objectif la réconciliation n´est en définitif, qu´une maison de culture d´irresponsabilité civile, une caverne de brigands, une vaste entreprise de vices, d´escroquerie politique, économique, financière et sociale. Un instrument d´embrigadement et d´intimidation, un haut lieu de corruption, de vol et de pillage dont l´existence et les activités sont incompatibles avec la démocratie. Le RPT, c´est le repoussoir absolu de notre vie politique. Ou vous acceptez la loi de ce „milieu“et vous bénéficiez de tous les privilèges et avantages du régime, ou vous la dénoncez et vous êtes voué aux gémonies………»
Pour souligner le caractère réfractaire du RPT-UNIR à l´idée d´alternance ou de démocratie je me rappelle de cette phrase écrite il y a quelques années par le PDG de Jeune Afrique, Béchir Ben Yahmed dans un de ses livres : «Le parti unique est pratiquement incapable de se démocratiser lui-même ou de démocratiser le pays.»
Le RPT était un parti unique auquel tous les togolais devaient appartenir de gré ou de force.
Et l´on sait tout le mal que ce „creuset national“a causé au pays jusqu´aujourd´hui.
C´etait donc un parti-état dans lequel tout le monde était obligé de regarder dans la même direction,une autre façon de voir les choses n´etait pas possible.
Si notre pays avait réussi son passage d´un régime de dictature à un régime démocratique, les togolais auraient dû enterrer le RPT dont le mode de fonctionnement était et est difficilement compatible avec la naissance d´un état de droit ou de démocratie.
On ne peut pas demander à un regroupement dont les membres ont fait main basse sur les richesses du pays d´accepter les conditions d´un dialogue qui les contraindraient plus tard à abandonner leurs privilèges.
On ne peut pas demander à des gens dont la plupart ne serait rien sans la dictature, sans l´injustice et sans le népotisme de créer les conditions d´une véritable alternance politique qui mettrait à nu leur médiocrité.
Eyadéma de son vivant a à plusieurs reprises répété qu´il a tué avant d´arriver au pouvoir et que si quelqu´un voulait sa place il n´avait qu´à le liquider s´il le pouvait. Le régime RPT-UNIR de Faure Gnassingbé est dans la même logique de conservation à tout prix du pouvoir.
L´intention du RPT-UNIR n´est pas de quitter le pouvoir ou de créer les conditions d´une véritable alternance politique, et ce, tant que le rapport de force lui sera favorable.
Chercher à discuter avec le pouvoir actuel du Togo serait une perte de temps, car presqu´un demi-siècle passés au pouvoir en volant, en assassinat, en pillant impunément, les a aveuglés à tel point, qu´ils croient que le pouvoir leur revient de droit et que le pays leur appartient à eux seuls.
Avec le régime de Faure Gnassingbé qui ne diffère en rien de celui de son père, et qui a juré la perte de son propre peuple, vous n´avez aucune chance, il vous laisse deux alternatives: ou vous avez les moyens et vous le neutralisez pour installer une vraie démocratie, ou vous n´avez aucun moyen et vous serez toujours tournés en bourrique avec l´organisation de dialogues bidons qui lui permettront de règner jusqu´à la fin des temps.
Si vers la fin de la deuxième guerre mondiale les russes avaient envoyé un émissaire auprès de Hitler pour lui proposer un dialogue, il aurait accepté pour gagner du temps et peaufiner une nouvelle stratégie pour peut-être rebondir. Mais cette chance ne lui avait pas été accordée.
En 2010 lors des manifestations du FRAC et au cours de sa pré-campagne M. Kofi Yamgnane avait plusieurs fois répété que la peur devait changer de camp.
Aujourd´hui en 2012 la peur a-t-elle changé de camp? Je ne crois pas.
Ceux qui font peur sont toujours en place jouissant d´une impunité sans fin; ceux qui ont peur et souffrent de la terreur continuent à subir en victimes expiatoires.
Ne nous faisons plus l´illusion d´un quelconque dialogue qui viendrait mettre fin à la crise.
D´ailleurs des ministres du gouvernement de Lomé n´ont-ils pas à plusieurs reprises prouvé leur méprise du peuple en affirmant que tout va bien et qu´il n´y a pas de crise?
Donc, même le pape nommé comme facilitateur au Togo échouerait devant l´arrogance et la méchanceté de ceux qui prétendent nous gouverner.
Au Togo les rôles sont clairement définis, il y a d´un côté un régime tyrannique, extrémiste, jusqu´au-boutiste, roulant pour les intêrèts d´un clan, prêt à aller au génocide pour conserver le pouvoir. De l´autre côté se trouve le peuple représenté par une opposition qui a déjà payé un lourd tribut en vies humaines sans rien recevoir en retour
Et c´est à cette opposition, quasiment dans son rôle de victime, que M. Comi Toulabor reproche de ne pas faire de propositions réalistes.
A quoi ressemblerait aujourd´hui une proposition réaliste de la part de l´opposition au Togo?
Cracher sur l´honneur, renier ses principes et aller s´asseoir à la table du diable comme l´a fait Gilchrist Olympio?
La fuite en avant du pouvoir en faisant élire une CENI sans aucun parti de l´opposition est
une preuve supplémentaire de la mauvaise foi d´un régime inhumain et aux abois.
La question qui se pose aujourd´hui n´est pas de savoir à quelles conditions il faut aller au dialogue et plus tard aux élections, mais plutôt comment faire pour que le Togo guérisse définitivement de ce cancer appelé RPT-UNIR.
Certains diront, qu´à cet effet, il nous faudrait un homme fort pour remettre de l´ordre dans le chaos total. Pour remettre tout à plat et tout le monde au pas et recommencer à zero; bref pour mettre fin à la pagaille qui n´a que trop duré.
Le temps est venu pour que nous nous mobilisions davantage surtout dans la diaspora pour soutenir la courageuse initiative des deux collectifs “Sauvons le Togo” et “Arc-en-Ciel”, qui depuis plusieurs mois déjà donnent du fil à retordre au pouvoir.
Ces deux regroupements ont eu le mérite de sortir l´opposition de sa léthargie et de faire renaître l´espoir au sein du peuple même si tout n´est pas encore parfait.
Même si nos marches pacifiques n´ont jamais été un réel danger pour le pouvoir en place, d´autant plus que, dans le souci d´éviter une boucherie humaine que pourrait provoquer le régime, nos manifestations se terminent à la plage ou à des endroits qui n´ont rien avoir avec le coeur du pouvoir; nous avons espoir, malgré la particularité de la composition de notre armée, que le moment est proche où des patriotes sortiront de l´ombre pour donner le coup de grâce au régime moribond des Gnassingbé.
Dans tous les pays où les “révolutionnaires “ont eu gain de cause, le comportement de l´armée a été plus ou moins déterminant. Dans beaucoup de cas la grande muette est intervenue pour terminer le travail entamé par l´opposition civile.
En Tunisie Ben Ali avait dû prendre la fuite parce qu´il n´avait plus le soutien de l´armée et risquait de se faire arrêter.
Même cas de figure en Egypte ou Moubarak avait été lâché par ses généraux dépassés par l´ampleur des manifestations.
Au Ghana, c´est connu, c´était des militaires avec à leur tête un certain J.J. Rawlings qui étaient intervenu pour mettre fin à l´instabilité politique dans ce pays, au Mali en 1991 c´était Amadou Toumani Touré, un militaire, qui avait arrêté la folie meurtrière de Moussa Traoré, au Niger c´était encore des militaires qui avaient empêché le président Tandja de s´éterniser au pouvoir.
Au Bénin, c´est le patriotisme d´un homme, Mathieu Kérékou, qui a permis l´avènement de la démocratie dans ce pays. Kérékou a eu la sagesse de laisser s´appliquer les décisions de la Conférence Nationale Souveraine en calmant les officiers de l´armée qui ne voulaient pas en entendre parler.
Chez nous Eyadéma n´avait pas hésité à envoyer ses chars contre la primature pour tuer la démocratie qu´il avait en horreur.
Et depuis c´est une opposition décimée, pauvre, orpheline et aux mains nues qui se démène pour venir à bout d´un régime totalitaire.
Et certains, ayant perdu le sens de la réalité ou manipulés, ont le culot de critiquer et de qualifier l´opposition togolaise de radicale. Une opposition radicale ne se laisse pas ridiculer des décennies durant, une opposition radicale, ça prend les armes et déclenche une guerre civile. Voyons la Somalie, voyons le Rwanda, voyons le libéria, voyons la RDC et voyons la Côte d´Ivoire. C´est ça des oppositions radicales.
C´est le régime qu´on a en face qui est radical et sauvage, pour ce régime d´un autre âge le peuple ne compte pas, c´est pourquoi les Togolais et les Togolaises ont le devoir et le droit de se donner les moyens pour le neutraliser.
J´attends poliment de ceux qui, après lecture de cet article, me classeront parmi les radicaux, de faire leurs propositions de sortie de crise. Mais je suis exigeant en leur rappelant que le sésame qu´il proposeront doit faire triompher totalement le peuple, car les Togolais et les Togolaises en ont assez d´une démocratie de façade. Comme au Ghana, comme au Benin l´ancien système avec ses hommes doit disparaître à jamais. C´est ça que j´entends par REVOLUTION.
Samari Tchadjobo
Allemagne, le 07/11/2012