LA CARESSE OU LE CALIBRE
«Écris, si tu veux contre nous
écris, si tu peux contre tout
l’encre de ta plume s’épuisera
mais nous, nous serons toujours là.
Nous avons la force et le pouvoir
et nos yeux, dans tous les couloirs.
Comme un sale moucheron
sans faute nous t´écraserons.
Aucun chien ici n’aboiera
lorsque mon PA t´abattra.»
Tels étaient les propos de l´un de nos gens d´arme.
Difficile pour lui de distinguer la plume d´une arme.
À ces propos d’un homme qui croyait vivre son paradis
Je m’armai d’un courage plat et lui répondis :
«La plume est l’instrument du dénonciateur
et l´arme, le langage du faible et du tueur.»
À peine, avais-je achevé ma risquée phrase
Pan ! Sur mon bec pour boucler cette phase.
Sa main de gorille transforma ma gueule en x.
Sir Adabia* était un type rond comme Astérix.
Dur chez nous d’être un rédacteur d’une « presse libre »
Caressez-les par vos écrits, vous éviterez leur calibre.
Adabia* : ex-commandant de brigade de la gendarmerie de Sokodé dans les années 90. Il fut l’adjoint au lieutenant feu Tchassama. Redoutable tortionnaire, cet homme était aussi reconnu pour ses crises de colère qui ne s’apaisaient que dans des actes de violence (Coups de poing, de bottes, de crosse de fusil, de ceinturon, gifles, insultes…) Il terrorisa les populations de Sokodé en organisant sous les ordres du lieutenant des incursions punitives et des arrestations intempestives de nos parents dans les mosquées aux heures matinales de prières.
Après sa retraite M. Adabia vit aujourd’hui oublié, à Kétao, où il rase les murs, nageant dans les dures réalités quotidiennes d’un citoyen de basse échelle. Que Dieu leur pardonne leurs actes.
Brême, Allemagne, le 11 Mai 2011.
Ali Akondoh