En politique, nous apprend-on, ce qui réussit véritablement, c’est ce qui est d’abord préparé dans la discrétion hors de la pression de l’opinion. Or , je m’excuse de le dire, la rencontre de Paris a révélé l’amateurisme des organisateurs qui ont pris le risque d’annoncer le résultat avant de faire asseoir réellement les acteurs. Peut-être qu’ils étaient trop sûr de leur coup et ont sous-estimé les difficultés qui sont propres au Togo. En plus, ils savaient pertinemment que les travaux d’une initiative similaire sont en cours à Lomé autour des sages et leaders d’opinion comme Elias Kpétigo, Komlan Alipui et Godwin Tété.Le minimum de respect aurait été d’associer au moins un représentant de ce groupe comme facilitateur pour bien faire, et limiter les dégâts que l’on sait.
Au jour d’aujourd’hui, nous serions complice de ne pas dire au peuple que cette mauvaise approche amène de sérieux problème et complique la tâche au groupe de Lomé, au point où François Boko a dû leur envoyer une lettre par laquelle il souhaite l’aboutissement du projet à Lomé.
La première question qui me vient à l’esprit est la suivante : pourquoi n’avoir pas impliqué l’acteur-clé qu’est Gilchrist Olympio ? Il a fallu connaitre l’échec pour que certains s’interrogent sur son absence et le prient de venir à la rescousse. Comme le dirait l’autre, rien ne nous prouve que le coup n’était pas dirigé plutôt contre lui : le séparer de son poulain Jean-Pierre pour mieux l’achever.
A partir de ce moment, on comprend pourquoi certains, comme le Bélier noir, ont vu à travers cette rencontre un guet-apens un bal masqué dirigé contre les anciens. Faire parcourir plus de 7000 km à une personne sous prétexte qu’il va rencontrer un haut responsable Français, alors que c’est pour un autre but (fût-il louable), est une pratique qui ressemble à celle du RPT. Il fallait plutôt mettre la bonne méthode pour voir par exemple si la CDPA qui nous a toujours parlé de « démocratie d’abord… » allait aussi se déjuger au profit de l’initiative de Lomé. On nous signale, par ailleurs, que les fidèles de Gilchrist n’ont même pas été conviés à ce qui devait être le couronnement de plus de vingt années de « fo gilchristisme ». Il faut dire que les organisateurs et inspirateurs de la rencontre ne le portaient pas dans le cœur, mais ont réussi à retourner son poulain.
La deuxième question est d’ordre pratique, pourquoi Kofi Yamgnane qui n’est pas candidat (ou du moins n’est plus) candidat se retrouve dans le ticket à ce stade là des discussions ? Il s’agissait, nous a-t-on dit, d’un conclave des « candidats ». Et sur cette base, certains ont été refusés. Yamgnane qui jouait le facilitateur à Lomé est brusquement devenu acteur comme « futur premier ministre » et que sais-je encore à Paris. Le tact diplomatique aurait été d’amener les candidats à reconnaître son importance et à l’inviter par la suite à la table de discussion. Face à une telle situation de manquements, comment ne pas comprendre la suspicion des (vrais) candidats ? Comme le dit ironiquement un ami français, ce sera un premier ministre « sans papier ». Allusion faite à son statut né de la décision inique de la Cour Constitutionnelle, une décision d’ « akpossosso » et de « patapa ».
La troisième question est la suivante : pourquoi Boko, dont le nom revient sans cesse dans cette manœuvre n’a-t-il pas postulé à la candidature suprême et unique ? Son positionnement de citoyen patriote au dessus de la mêlé aurait pu servir cette fois-ci. A lui, on n’aurait pas, en pareilles circonstance, décelé des « erreurs de dates » dans ses documents. Il a été ministre au Togo. Je ne voudrais pas revenir sur un bel article, publié sur un site internet togolais, regrettant ses missions ailleurs au détriment d’un combat pour le Togo. Vaut mieux tard que jamais. Mais en voulant aider son pays sans mettre la main au cambouis est le sûr moyen de le desservir, surtout lorsque d’autres sont déjà sur le projet.
A vrai dire vouloir mettre la faute sur ceux qui sont partis, c’est oublier soi-même qu’on n’a pas suffisamment pensé à son affaire et au principal problème qui reste lié à un courant de l’UFC.
Les principales difficultés du brave Jean-Pierre Fabre se trouvent malheureusement au sein de son propre parti. Reconnaissons-le, et disons la vérité au peuple qui n’est pas bête. C’est le problème que tente de régler d’abord les sages de Lomé : amener Gilchrist Olympio a déclarer publiquement son soutien à Fabre et amener les médias proches de lui à faire une réelle promotion de Fabre qui le mérite largement. Nul n’ignore que pour l’instant, il y a une bonne partie de l’UFC qui ne gobe pas la candidature de Fabre, au point de lancer des rumeurs assassines à son encontre. Il faut aider Jean-Pierre Fabre, mais pas par des méthodes inappropriées.
Savez-vous par exemple que le courant du député UFC Habia Nicodème n’avalise pas jusqu’à présent le choix de Jean-Pierre Fabre ? Quand on connait la capacité mobilisatrice de ce leader du MCA on ne peut pas fermer les yeux sur sa position. Savez-vous également que malgré la décision de la « direction » de l’UFC de se retirer de la CENI, un membre de l’UFC (Homahoo, pour ne pas le nommer) compte ne pas suivre cet avis ? Aller y comprendre pourquoi.
Pour sa chance de libération, le Togo ne peut pas se passer du choix d’une candidature unique de son opposition. Pour se faire, Jean-Pierre Fabre est certes bien placé. Nous devons le soutenir. Mais abordons le sujet avec sagesse et sérénité, puisqu’une partie non négligeable de son propre parti UFC voudrait prôner le boycott des élections : En réalité parce que Gilchrist Olympio n’est pas candidat et que les élections sont mal préparées .
France, 12 février 2010,
Bataskom Kpém A.