Entre les familles Gnassingbé et Madjoulba, le feu couvait [Par Camus Ali]

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Un peu d’histoire…

Dans la liste des militaires que nous pouvons appeler aujourd’hui les «prophètes» parce qu’ils avaient vu juste qu’il faille déposer très tôt le général Gnassingbé Eyadema avant qu’il ne s’assied sur le Togo pour des décennies, se trouvait les soldats natifs du canton de Siou : Gilbert Bafidanwoura Madjoulba et Rédah. Ils sont les premiers à ne pas comprendre qu’un soldat de rang adoubé par la France devienne du jour au lendemain bourreau contre ses frères d’armes. Fatigués par la brutalité inouïe de Toukroukpè Etienne (Nom connu de Gnassingbé Eyadema dans la coloniale et au Benin. Cf Jean Dégli : La Tragédie Africaine page 46), ils décidèrent de foncer chez leur chef hiérarchique, le colonel Kleber Dadjo. L’objet de la visite était de lui faire entendre raison que, trop c’est trop. «Nous devons déposer Eyadema». Refus catégorique de leur hôte qui fut entre temps, président du Togo pour trois mois : «Eyadema est mon fils» recadre-t-il. Ironie du sort, il sera réhabilité à la Conférence Nationale Souveraine (CNS) et de nouveau éteint par celui qu’il appelait son fils. Eyadema après avoir repris le pouvoir par moult intimidations sur les acquis démocratiques mettra cette réhabilitation sous le boisseau. Son fils Faure Gnassingbé ajoutera le nom d’Abass Bonfoh à celui de Kléber Dadjo comme indésirables pour être appelés présidents du Togo. Les peuples Bassar et Nawdba sont priés de hisser haut, sinon très haut le drapeau de l’amour que les Gnassingbé leur vouent !

Dajo, Kleber

Pis, Kleber Dadjo trahira ses frères Nawda en allant souffler dans les oreilles de l’ «inculte» président qu’un coup d’Etat se préparait contre lui (c’est le côté sombre de l’emblématique officier dans la tragédie qu’a connu les natifs de Siou). Un fils d’un ancien combattant raconte à Lynxtogo.info :«Il fut un moment, il était interdit de postuler comme militaire quand on était natif de Siou». C’est le cadeau fumant que du haut de ses galons Kléber Dadjo avait donné à son canton. Des sources recoupées, l’éphémère président du Togo reprochait à l’un des fils du village d’avoir mis sa boulimie sexuelle sur l’une de ses femmes quand il était en campagne militaire pour la grandeur de la France. Cette haine, il va la déverser, pas sur le colon français qui l’utilisait pour faire une guerre qui n’était pas la sienne mais sur ses propres frères. Vous avez dit syndrome de Stockholm ? Nous voici à l’épreuve !

L’ «Amour-haine» entre les familles Gnassingbé et Madjoulba

Les soldats Gilbert Madjoulba et Redah qui avaient été soupçonné de coup d’Etat sont jetés en prison. Sortis exténués, ils regagnent leurs villages et apprennent à regarder Lomé dans la radio. Progressistes dans l’âme, Redah devient chef canton de Siou. Gilbert Bafidanwouwa Madjoulba devient griot du village. Ses chansons sont bien connues dans le tout Doufelgou. Il chante les faits de société et tente de faire passer ses idées révolutionnaires. Polygames dans le sang, ils peuplent  le canton de Siou d’enfants et les apprennent à aimer le métier des armes. Deux officiers sortiront dans la grande famille Madjoulba : Calyxte et Toussain.

Ernest Gnassingbé fait de Toussain un allié et regarde comme son père Gnassingbé Eyadema ces «Madjoulba» de loin. Quand il est frappé d’une hémiplégie, Toussain suit son destin. Au lieu de Saint-Cyr à Coëtquidan en France pour les brillants, on envoie plutôt le Nawda au Cameroun. Tout un symbole ! Après le décès du généralissime président, les choses vont aller vite. Toussain Bitala Madjoulba est prié de garder la sécurité de Faure Gnassingbé. Cette stratégie selon Sun-Tsu permet de mieux surveiller l’«homme craint». Le laisser dans une unité, donc libre de ses idées et mouvements fait de lui un insaisissable. Quant au frère, Calyxte, Faure Gnassingbé trouve l’idée géniale de l’éloigner du Togo. Du haut de ses galons, il devient diplomate. Robert Guéi  avait appliqué la même stratégie en envoyant le sergent Ibrahima Koulibaly alias (IB) à l’ambassade de Côte d’Ivoire au Canada. Avec des émoluments de cinq millions de Francs CFA par mois. La suite de l’odyssée est connue quand le soldat tourne le dos à son salaire et retourne clandestinement en Côte d’Ivoire.

Toussain se révèle un «peu» trop libre d’esprit et cultivé 

Une rafale de bande audios et de coupures de presse dispatchée la semaine dernière par la propagande fait du défunt colonel  un ami de Faure Gnassingbé et un fidèle du chef d’Etat-major, le général Félix Kadanga. Si tel était le cas, pourquoi les «supposés» amis du colonel refusent qu’on fasse une enquête indépendante, claire et responsable sur sa mort ?

Comme tout homme, Toussain Bitala Madjoulba qui a déjeuné la veille chez le ministre Gilbert Bawara avec lequel, ils ont fait la classe de CE1 à Siou n’était pas trop l’officier type qu’il fallait pour garder les jardins du prince pour le quatrième mandat. Un vol de trop dans la collection ! «Imprévisible» raconte une source. L’homme, il paraît n’aurait pas oublié l’humiliation que son père avait connu après son retour au service de la coloniale.

C’est cette haine empreinte de vengeance qui amènera son fils Toussaint Bitala une fois, à l’école militaire de Tchichao à vouloir lors d’une rixe  mettre en morceau Toyi Gnassingbé le fils d’Eyadema? Selon leur instructeur aujourd’hui basé aux Etats-Unis, «Toussain était un militaire discipliné et un bon élément». Progressiste dans l’âme comme son père, une autre source rapporte que : «Toussain n’était pas un soldat de rang. L’homme était un bon élève en mathématique et s’informait plus que, n’importe quel officier». Il a oublié que dans la légende selon les Gnassingbé, seuls les incultes, les brutes et les tueurs ont droit au paradis. Faure Gnassingbé à beau courir par monts et veaux, le drame Madjoulba est le boulet à ses talonnettes, le petit grain dans son soulier. Il devra désormais apprendre à vivre avec le fantôme du Nawda . Le crime semble avoir trop duré et la rallonge des cadavres devient aussi longue.

Camus Ali

Lynx.info

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