On a l’habitude de dire que l’on a les dirigeants que l’on mérite. Il suffit de faire le bilan sur le cycle des 20 ans que l’on «fêtera» en décembre prochain. Les Ivoiriens savent-ils faire autre chose ? A lire les journaux, toutes tendances confondues, à lire les compte-rendus du gouvernement et des réunions des différents partis politiques, les sujets d’actualité seraient : l’avenir du Pdci, les guerres fratricides Fpi/LIDER, les 19 ans du Rdr, le devenir de Banny, de la Cdvr, qui sortira et qui entrera à La Haye, le niveau de Kandia et l’avenir des «jeunes» : Soro, Bakayoko et Billon.
Au passage, on observera que nous sommes toujours fâchés avec les textes et la loi, ceux des appels d’offre, ceux du renouvellement des instances consulaires et professionnelles, ceux de la limite d’âge, du foncier etc., la parole n’engageant que celui qui la reçoit. Bref rien que des sujets de «personnes» et de «pouvoir»! … Intriguant non? Et le peuple, et les institutions, et l’emploi, et le mirage annoncé et la Nation ivoirienne? Or les attentes et les priorités sont ailleurs. Tenaces et concrètes. Mesurables. Les présidents passent, les populations trépassent. Depuis 20 ans, une poignée de politiciens a pris en otage vingt millions de personnes pour l’un des plus grands hold-up démocratique de l’histoire africaine.
Le bilan? Rien n’a changé, tout juste se battent-ils pour se réclamer du «Père Fondateur», sans savoir exprimer ce qu’est l’Houphouëtisme qui leur a permis d’exister. Quels sont les «3R» : Reconnaissance, Résilience, Renaissance ? Seule la volonté de changement exprimée au premier tour des élections nationales était à respecter. On dit quoi? On va où là? Le seul record du monde dont on puisse se vanter, parmi tous ceux que nous collectionnons dans les pires positions mondiales: le dopage des chiffres, l’absence de projet de société, la reconduite des mauvaises habitudes, l’incompétence et le racket à tous les étages, la «c’est pour nous-attitude» n’est finalement qu’une pratique que l’équipe au pouvoir et son entourage, se repasse tous les 5 ou 10 ans, c’est selon. Rien ne saurait changer si le peuple ne prenait conscience qu’il n’y a pas de messie à attendre mais un projet de société avec des équipes qui mettent l’intérêt général et une politique de développement en priorité. Au-delà de la théorie du 3ème homme, et face au piège politique dans lequel se trouve le président, la colère est froide, silencieuse, et monte chaque jour. Les entourages incarnent le mensonge et la tromperie. «Tout ça pour ça»!
La seule constante touche aux scandales et aux amalgames grossiers. Les populations le savent, les cadres le savent, les médias, les chancelleries aussi. L’émergence était une promesse de campagne, elle ne tient pas et on ne peut impunément faire semblant de travailler pendant que son peuple se meure. L’offre politique est à reconstruire, le bruit et les bavardages ne marchent plus. La réconciliation c’est d’abord le bon sens, le courage, le pardon, la vérité et surtout le dialogue. L’impunité et la justice à deux vitesses ne peuvent perdurer.
Les politiciens ne peuvent faire obstacle à la mémoire et à l’avenir d’un pays. On ne peut faire comme si rien ne s’était passé. Lamentable spectacle irresponsable. Ce n’est pas un pont ou des libertés provisoires qui vont «blaguer» les gens, encore moins les invectives d’opposants à chaises vides et à têtes chercheuses. Le chômage touche plus de 50% de la population active, n’en déplaise aux faussaires. Le cumul des mandats et des mandants ne peut se justifier. L’exception est désormais d’identifier un ministre non Pdg ou actionnaire indirect de plusieurs sociétés profitant de «l’émergente émergence». Quel exemple et comment s’étonner des conséquences ? De quelle Côte d’Ivoire parle-t-on ? Une et indivisible ? Celle qui doit juste faire mieux que l’équipe d’avant ou celle qui doit reprendre sa place internationale, continentale et régionale ? Celle de Wattao ou celle du «vieux» Usher ? Quels codes, quels repères, quelles valeurs ? Celle qui donne l’exemple ou celle qui n’inspire toujours pas confiance ? Qui, de ces acteurs, aurait osé cela du temps d’Houphouët ? Ce reportage est catastrophique pour notre image qui n’en avait besoin. Les avions et les hôtels sont pleins mais où sont les investissements et les projets quand les opérateurs fuient aux premiers contacts devant l’inconsistance des interlocuteurs ?
Peut-être que ces images, qui ne manqueront pas d’arroser les réseaux sociaux, seront salvatrices, comme le furent celles d’«Envoyé spécial» sur la politique du groupe Sifca. Le pouvoir est transmis par les urnes avec la promesse de nous respecter et de faire mieux que le précédent, mieux pour les Ivoiriens, pas pour l’entourage, la famille, les neveux, mais pour les Ivoiriens. Les «biens mal acquis» et l’enrichissement sur la misère des autres ne sont plus au programme. Les priorités sont connues : emploi, santé, éducation, justice, sécurité. L’endormissement des consciences ne fonctionne plus. Ce reportage n’est que le juste rappel de la réalité quotidienne à Abidjan. Un pauvre sans emploi, sans éducation, ne pouvant se payer autre chose que du crack et des illusions, un pauvre ne pouvant se payer un avocat et allant à la Maca. S’il a de la chance «Le chinois» le gérera. Côte d’Ivoire, yako!
Il est grand temps de se mettre au travail, de bavarder moins et de faire plus. Il est temps de redonner un sens à notre devise : Union, Discipline, Travail. Hondelatte, circulez il n’y a rien à voir!
Intelligent d’Abidjan