Procès Laurent Gbagbo : sur l’abandon des charges et la non compétence de la CPI !
Comme suite à l’audience que j’ai eue le 14 avril 2012 avec le Président Laurent GBAGBO, je vous communique ci après mon approche juridico/sémantique qui devrait prévaloir dans la défense des intérêts de celui-ci.
En effet, par nature ayant toujours voulu éviter le silence prudent, tactique, qui ressemble à de la complicité à travers l’évitement de la réalité, je pense qu’il est important d’avoir plusieurs prismes de lecture, dans ce type de procès pour faire émerger toutes les vérités.
En résumé de ce qui va suivre, je dis qu’il ne faudra pas prioritairement chercher à démontrer à tous prix la non culpabilité de Laurent Gbagbo pour ce dont on l’accuse,(bien qu’il faille le faire et garder les pièces sous le coude au cas ou !) mais plaider l’abandon pur et simple des charges au seul motif qu’il était, depuis le 4 décembre 2010 le chef d’Etat de plein droit en exercice en Côte d’Ivoire et qu’il était de fait, dans une posture de légitime défense, prévue aux articles 100 et 101, chapitre 2 section 1 du code pénal ivoirien du 31/08/1981, et qu’en conséquence l’action engagée contre lui devant la CPI ne saurait prospérer.
Les exactions dont on accuse Laurent Gbagbo seront donc imputées dans leur totalité à la seule coalisation qui a déclaré la guerre à l’Etat souverain de Côte d’Ivoire.
Je rappelle également que nous allons entrer dans un procès politique, qui ne dit pas son nom.
Un procès politique est difficile à conceptualiser, il se caractérise par des irrégularités, des créations de preuves des immixtions diverses des exécutifs étrangers dans une justice pénale qui se doit d’être apolitique.
On a bien vu récemment, au travers de la lettre du 27 mars 2012 que le procureur Ocampo à adressé à monsieur Soro, le félicitant, entre autre pour sa nomination à la tête de l’assemblée nationale ivoirienne, que la justice pénale internationale n’était pas apolitique.
Le procès politique est l’opposé du procès de droit commun, il se définit, selon Jacques Chiffoleau par « la suspension du droit et du temps »
Avant toutes choses il conviendra de faire démontrer par des experts que nous sommes bien dans un procès politique, en décortiquant les causes qui justifient cette appellation et en énumérant les conséquences factuelles Politico Economiques, résultant de ces causes, constatables en Côte d’Ivoire, qui prouvent que nous avons bien affaire à un procès politique.
Dans un deuxième temps il faudra invoquer la, non compétence de la CPI.
La destitution du Chef d’Etat Laurent GBAGBO, pour permettre illégalement des poursuites pénales, est proche de ce qu’on appelle en droit anglo-saxon, « l’impeachment ».
Voyons maintenant comment argumenter ce type de défense.
1/ L’accusation a avancé un postulat qui était de dire que Laurent Gbagbo avait perdu les élections en Côte d’Ivoire et qu’il avait refusé de quitter le pouvoir. De fait toutes les violences et exactions qui en ont suivi ont été de sa responsabilité. Ce postulat, par définition n’a jamais été démontré ! Même pas à postériori.
A grands renforts de médiatisation, de propagande et probablement de compromissions, ce postulat à été transcendé en vérité fondamentale par quelques putschistes et a été fait accepté par une frange belliciste de la communauté internationale, sans qu’aucun fait tangible et vérifiable en droit n’ait attesté cette transposition.
2/ La défense va devoir démonter ce postulat à l’aide d’un raisonnement axiomatique, qui va prouver qu’au vu d’un certain nombre de faits, de textes, de lois et de comportements Laurent Gbagbo n’a pas perdu les élections présidentielles de novembre 2010. Pour ce faire il va falloir prendre en compte et mettre en perspectives les organes suivants :
/ La constitution ivoirienne (entre autre les pouvoirs du chef de l’Etat et les prérogatives inaliénables du Conseil Constitutionnel).
/ La loi portant fonction et attribution de la CEI, du 9 octobre 2001.
/ Le statut de Rome.
/ Le code électoral ivoirien.
/ Le code pénal ivoirien.
/ La charte des Nations Unies.
/ Les résolutions des Nations Unies attribuant pouvoirs ou non en Côte d’Ivoire.
Sur le rejet pur et simple des charges.
Vu l’article 2.7 du chapitre I de la charte des Nations Unies sur « Le respect de la souveraineté et de la non ingérence dans les affaires nationales à l’occasion d’élections présidentielles »,
Vu la mission de simple certification du processus électoral de l’ONUCI, portant sur, la paix, l’inclusion, les médias d’Etat, la liste électorale et les résultats,
Vu la résolution N° 1765 du 15 juillet 2007 refusant au représentant du secrétaire général des Nations Unies en Côte d’Ivoire, M. CHOI le rôle de haut représentant pour les élections en Côte d’Ivoire,
Vu qu’il est à priori impossible de dire, à ce jour qui de M Laurent Gbagbo ou de M. Alassane Ouattara, a effectivement gagné les élections dans les urnes,
Vu cependant, les rapports des observateurs internationaux accrédités par la CEI ayant reconnu des faits graves de nature à entacher sérieusement la sincérité et la régularité des votes,
Vu la loi portant fonction et attribution de la CEI, du 9 octobre 2001, comme autorité administrative et non comme juridiction, impliquant qu’il y a dans la chose dite de sa part, non exéquatur,
Vu l’alinéa 2 de l’article 59 du nouveau code électoral ivoirien selon lequel : «3 exemplaires des PV accompagnés des pièces justificatives sont transmises à la CEI, celle-ci procède aux opérations de collecte et à la proclamation des résultats provisoires, dans un délai de 3 jours »,
Vu qu’il est constant de dire que ce qui est provisoire est préalable à une autre chose qui lui sera définitive,
Vu la déclaration du Président de la CEI le 1er décembre 2010 à 23 h 45 sur les ondes de la RTI attestant que l’action de son organe administratif est forclose du fait de l’expiration d’un délai d’exercice de droit,
Vu l’engagement de ce même Président, le même jour et à la même heure de confier dès le lendemain son dossier au Conseil Constitutionnel,
Vu la composition et l’exécutif de la CEI, accréditant la thèse d’une indiscutable partialité, de cette organisation,
Vu la précédente dissolution en février 2010 de cette CEI, aux motifs d’avoir « fait inscrire ou tenté de faire inscrire 429 030 pétitionnaires qui n’y avaient pas droit, d’avoir par ailleurs fait du faux et d’en avoir usé » créant ainsi un préalable dans une juste suspicion en cet organisme,
Vu l’article 60 du code électoral ivoirien ayant permis au candidat Laurent Gbagbo de déposer par voie d’huissier auprès du Conseil Constitutionnel ivoirien légalement tenu et représenté, dans les 3 jours qui ont suivi la clôture du scrutin, des recours dûment argumentés et exposés,
Vu l’article 63 du code électoral ivoirien qui stipule que le résultat définitif des élections est proclamé par le Conseil Constitutionnel après examen des réclamations,
Vu qu’aucune réclamation n’a été déposée par le candidat Ouattara,
Vu l’article 94 de la constitution ivoirienne autorisant le Conseil Constitutionnel à statuer sur les contestations et à proclamer les résultats de l’élection présidentielle,
Vu l’article 98 de la constitution ivoirienne qui stipule que « les décisions du Conseil Constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics, à toute autorité administrative, juridictionnelle, militaire et à toute personne physique ou morale »De fait, la manière de statuer « ultra petita »de la part de cette instance supérieure ne pourra jamais être mise en exergue,
Vu la décision sans appel N° CI-2010-EP-34/03-12/CG/SG du 3 décembre 2010 du Conseil Constitutionnel, proclamant M. Laurent Gbagbo vainqueur au 2e tour de l’élection présidentielle,
Vu les articles 88,94 et 98 de la constitution ivoirienne qui exposent qu’il puisse y avoir un lien de subordination, dans un contexte d’urgence, du code électoral par le Conseil Constitutionnel, qui est « l’organe régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics » on entérinera la décision du Conseil Constitutionnel d’avoir proclamé Laurent Gbagbo vainqueur des élection plutôt que d’avoir, en fonction de l’article 64 du code électoral ivoirien révisé en 2008, annulé les élections et des les avoir repositionné 45 jours plus tard,
Vu le 4e accord de OUAGADOUGOU d’octobre 2008, titre II article 3 qui prévoyait, sans jamais avoir été implémenté, que les opérations de désarmement devaient être achevées au plus tard 2 mois avant la date des élections,
Vu que cet accord avait été entériné par M. CHOI, le représentant spécial des Nations Unies en Côte d’Ivoire, en personne, devant le Conseil de sécurité des Nations Unies, le 21 janvier 2009,
Vu que cet accord n’a jamais été respecté et que les Nations unies, à l’encontre de cet accord ont autorisé le déroulement des élections en Côte d’Ivoire, et vu le contexte sociopolitique dans le pays, il a été plus sage et responsable pour le Conseil Constitutionnel de déclarer le 3 décembre 2010 Laurent Gbagbo vainqueur des élections plutôt que de repositionner de nouvelles élections, au risque, en son temps, d’embraser le pays !
Vu l’investiture de M. Laurent Gbagbo par le Conseil Constitutionnel le samedi 4 décembre 2010,
Et,
Vu l’article 48 de la constitution ivoirienne, on dit que le Président Laurent Gbagbo a défendu la souveraineté et l’intégrité de son pays en répondant dans une posture de légitime défense prévue aux articles 100 et 101, chapitre 2 section 1 du 31 Août 1981, du code pénal ivoirien à une guerre qui lui a été déclarée par une armée de forces coalisées.
Il est donc patent qu’il faille abandonner purement et simplement les charges avancées par l’accusation.
Sur la non compétence de la Cour Pénale Internationale.
Vu la décision N°002/CG/SG du 17 décembre 2003 du Conseil Constitutionnel ivoirien déclarant que « le statut de Rome instituant la cour pénale internationale est non conforme à la constitution ivoirienne du 1er août 2000 », rendant ainsi caduque l’acceptation antérieure en date du 18 mars 2003 de la compétence de la CPI par le gouvernement de Laurent Gbagbo,
Vu la reconnaissance de la CPI, en violation de l’article 98 de la constitution ci-dessus évoqué, le 14 décembre 2010, de l’hôtel du Golf, par le « gouvernement Ouattara » autoproclamé,
Vu l’accord politique d’entraide judiciaire, pris en violation de la décision N° 002/CG/SG susvisée, signé le 29 juin 2011 entre l’exécutif ivoirien et le procureur Ocampo de la CPI, qui ciblait exclusivement la déportation arbitraire du Président Gbagbo à la CPI,
Vu l’article 59 du statut de Rome, traitant des procédures d’arrestation dans l’Etat de détention…conformément aux dispositions du chapitre IX, traitant de coopération internationale et d’assistance judiciaire, en regard de la remise par les autorités ivoiriennes, du Président Laurent Gbagbo à la CPI le 29 novembre 2011.
Vu l’arrêt N°76 du 29 novembre 2011 de la chambre d’accusation de la cour d’appel d’Abidjan ordonnant la remise de Laurent Gbagbo à la CPI, rendue en totale contradiction avec l’article 59 évoqué ci-dessus et de l’article 89 du même statut,
Il appartient donc aujourd’hui au Président Laurent Gbagbo :
/ De contester les conditions dans lesquelles il a été arrêté,
/ De dire que sa détention est, au-delà d’être arbitraire, illégale aux motifs
a) que toutes les reconnaissances et autres accords politiques qui auraient été conclus entre l’Etat ivoirien et la Cour Pénale Internationale, après le 17 décembre 2003, pour permettre l’habilitation de la CPI à extrader et juger tout citoyen ivoirien, seraient nuls et de non effet
b) Qu’en tant que chef d’Etat légalement investi dans ses fonctions par l’organe constitutionnel ivoirien issu de la constitution ivoirienne, Laurent Gbagbo était le garant de l’intégrité et de la souveraineté de la Côte d’Ivoire.
En conclusion.
Préparer une défense à décharge par rapport aux charges apportées par l’accusation, mais, trouver une passerelle Juridico-sémantique pour venir plaider en priorité, l’abandon pur et simple des charges,
Mandater un expert en rhétorique, historien, pour démontrer que nous sommes dans un procès politique, et exposer les tenants et aboutissants d’un tel procès,
Plaider le rejet pur et simple des charges,
Contester les conditions d’arrestation et de déportation les 28 et 29 novembre 2011,
Plaider l’illégalité de sa détention,
Et dire qu’à ces titres Laurent Gbagbo bénéficie d’un non lieu pour vice de procédure et qu’à minima :
a) Il retourne en Côte d’Ivoire en recouvrant tous les avantages liés à sa fonction en siégeant au Conseil Constitutionnel ivoirien dont il est membre de droit à vie, en regard de l’article 89 de la constitution ivoirienne,
b) Tous ses sympathisants détenus illégalement ou réfugiés politiques recouvrent leur liberté en étant dédommagés à hauteur de leurs souffrances,
c) Il soit lui-même dédommagé de lourds préjudices, autant moraux que matériels et physiques,
d) Tous ses biens lui soient rendus après avoir été remis en état,
e) Il y ait, dans un laps de temps raisonnable à définir de nouvelles élections présidentielles.
Aparté.
Il est à préciser que pendant la crise postélectorale le Président Laurent Gbagbo aura à maintes reprises demandé à ce qu’il y ait un recomptage des voix, alors qu’il n’en n’était pas obligé ! A chacune de ses demandes une fin de non recevoir se fit entendre par M. Ouattara.
A l’évidence ce processus de recomptage est quelques chose de notoirement courant, qui a fait jurisprudence et qui aurait dû être intégré à la fois par le clan Ouattara et par ses conseillers de l’Union Africaine et de la Communauté Internationale.
En effet, cette action de recomptage des voix s’est faite en 2009 en Afghanistan, également en 2009 en Moldavie lors des législatives, en 2000 dans l’Etat de Floride aux USA entre les candidats Bush jr et Al Gore ou encore en novembre 2011 en Haïti lors des présidentielles entre Jude CELESTIN et Michel MARTELY.
Même le code électoral Arménien prévoir en ses articles 73, 74, 75 et 76 un mode opératoire dans l’hypothèse de recomptage de voix ! C’est dire l’iniquité des refus évoqués ci-dessus !
Alain CAPPEAU Conseiller Spécial du Président Laurent Gbagbo.