Philippe Desmars (gendarme français et patron du restaurant Okavango) pointait déjà les tortionnaires du Togo. Dix ans après…ils sont toujours là !

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Le ciel s’assombrit sur mon avenir au Togo. L’incident se passe à l’intérieur du camp militaire de la gendarmerie le mardi 11 février 1997 dans la matinée. Je suis en compagnie du capitaine ANTOINE qui vient tout juste d’arriver à LOME . A la sortie d’un bâtiment administratif, je remarque un édifice porteur d’aucune inscription, qui avait jusqu’à ce jour échappé à mon attention .Je décide de m’en approcher et de pénétrer à l’intérieur ,je constate qu’il ne s’agit que d’un banal bâtiment réservé aux sous-officiers mis aux arrêts de rigueur, déduction confirmés par trois gendarmes sanctionnés assis dans une des pièces .Au moment de m’en aller ,je suis de nouveau intrigué cette fois ci par une porte métallique noire munie d’un gros cadenas située au fond de la même salle .J’invite pour ne pas dire j’ordonne que le gendarme de garde ’ouvre cette mystérieuse porte .Il obtempère sans discuter. La porte ouverte : c’est la stupéfaction ! Je découvre un mouroir ou une trentaine d’individus empilés les uns sur les autres, dans le noir croupissant à même le sol.

Le même jour dans la soirée un missi dominici, le capitaine ATTI, dépêché par LAOKPESI frappe à la porte de mon appartement de fonction au SITHO, ce que je craignais est arrivé. (« Agouti royal », toi et le capitaine ANTOINE, vous êtes convoqués demain matin à 5h dans le bureau du capitaine YARK pour affaire vous concernant. La SRI je sais où elle se trouve du fait de sa proximité avec les locaux que nous, miliaires français, nous occupions et aussi pour y être intervenu maintes fois lorsque les cris de douleur des prisonniers gardés à vue me sortaient certains jours de ma torpeur. J’intervenais alors pour calmer les ardeurs des enquêteurs zélés et j’obtenais toujours la même réponse « ce n’ai rien AGOUTI ROYAL on donne la fessé,gentil euphémisme utilisé dans le jargon du gendarme togolais La fessée est sorte de pédagogie destinée à débourrer la mémoire des plus obtus mais qui s’avère quelques fois hélas mortelle(je vous invite à lire les bulletins de liaison gendarmerie concernant les punitions dérisoires infligées aux responsables de ces décès de personnes gardées à vue dans les locaux des brigades et compagnie de gendarmerie. Selon un rapport alternatif de l’Organisation Mondiale de la lutte contre la torture de Mai 2006 présenté devant le Comité contre la Torture des Nations Unies, il existerait dans l’enceinte de l’État major de la gendarmerie un bâtiment de garde à vue appelé « using »dans lesquels des sévices graves sont infligés aux détenus. N’employez plus le conditionnel ce bâtiment existe et je pense être le seul coopérant à l’avoir vu et découvert ce qui s’y passe.Il est 5 heures 30 lorsque nous sommes reçu ANTOINE et moi pour le Commandant de la SRI et entendu comme de vulgaires délinquants YARK a besoin de savoir ce qui s’est passé pour rassurer son maître LAOKPESSI dont il connait la capacité de nuisance il sait aussi qu’il pourra peut-être faire mieux que son mentor et prendre un jour sa place, il lui faudra juste de la patience et se montrer encore plus dure avec ses compatriotes enfin ceux qui aspirent à un réel changement .Je prends la parole à la suite de cette inévitable question (posée par YARK) » Que faisiez-vous à l’intérieur du bâtiment réservé aux sous-officiers sanctionnés par la hiérarchie ? Et moi de rajouter votre question est incomplète mon capitaine, vous oubliez comme si vous aviez peur vous-même d’en parler, la pièce ou sont dissimulés forcément de dangereux individus au point que cet endroit soit tenu secret et apparemment interdit aux coopérants militaires.et qui nous vaut cet entretien très matinal. A moins que ces hommes n’est contracté un redoutable virus et mis en quarantaine pour une question de salubrité publique, pourriez-vous nous éclairer sur les inquiétudes de vos supérieurs d’une telle découverte et le courroux inextinguible de votre Commandant la gendarmerie. Les traitements cruels auxquels sont soumis ces prisonniers pèsent sur ma conscience mais le commandant la S.R.I sera très vite me rappeler ou se trouve mon intérêt .Sa réponse pleine de sous entendu calmera mes ardeurs.Quelle belle arrogance pour quelqu’un qui désire s’installer au Togo me lance le capitaine YARK esquissant un sourire narquois.Ecoutez mon capitaine j’ai mis toutes mes économies dans la construction du restaurant l’OKAVANGO le voici ouvert depuis janvier 1997, j’ai donc lié mon destin avec celui du TOGO pour de nombreuses années.

Si cela peut vous rassurez . Je tiens à vivre tranquillement dans ce pays et surtout ne pas avoir d’ennui.Une fois nos explications fournies sur les circonstances qui nous avaient amenées à l’intérieur du fameux bâtiment nous avons été autorisés à regagner nos domicile. IL nous a été recommandé de rester discret sur cet incident .Le capitaine YARK savait que j’étais pieds et poings liés. Quant au capitaine ANTOINE et ses quinze jours de présence au Togo ne se sentait pas très concerné, il n’aspirait qu’à une chose passé un séjour sans histoire.L’affaire suit son court et en fin de matinée je me rends au domicile du Colonel Alain AMORY du 6 ième régiment parachutisme d’infanterie de marine et conseiller technique auprès du général TIDJANI camarade de promo de Saint CYR dudit général Je sais déjà ce qui t’amène me dit-il, je suis au courant de l’affaire, LAOKPESSI a demandé au Président EYADEMA ton expulsion du TOGO après avoir au préalable rendu compte à TIDJANI, et je te rassure de suite le Président a refusé. Me voilà donc soulagé mais pour combien de temps ? LOAKPESSI forcément très déçu de n’avoir pas été suivi craignait qu’il ne lui soit reproché un manque de vigilance voire de laxisme et d’être considéré comme l’unique responsable aux yeux de celui qui l’avait placé à ce poste de commandement. Un incident donc préjudiciable pour son avenir pouvant peut-être même porter un coup d’arrêt à sa carrière LAOKPESSI comme un chien enragé veut mordre tout le monde, de lourdes sanctions seront prise à l’encontre du gendarme qui m’a ouvert la porte le chef de poste et l’officier de permanence seront mis aux arrêts Deux mois après l’incident je de nouveau convoqué avec ANTOINE dans le bureau du colonel LAOKPESSI toujours très remonté et ne digérant pas cette histoire.il nous fera un sermon auquel nous n’avons pas répondu.

La clémence présidentielle avait été décidée juste pour ne pas polluer les relations entre la France et le Togo à peine réchauffée après le coup de froid des années 1990-91. LOAKPESSI cynique et revanchard guettera le moindre de mes faux pas.

Philippe Desmars

Gendarme GIGN et GSPR

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