Quand des personnes comme moi affirment que, pour conquérir notre vraie indépendance, l’Afrique francophone devrait, dans un premier temps, s’appuyer sur une puissance militaire respectable et respectée, certains Africains soutiennent, sans le prouver, que les Russes ne sont pas différents des Français et que nous devrions éviter de quitter un maître (la France) pour nous jeter dans les bras d’un autre maître (la Russie).
Or c’est une vérité historique que l’URSS ne fait pas partie des puissances étrangères qui agressèrent et saignèrent l’Afrique après la conférence de Berlin (15 novembre 1884-26 février 1885). Au contraire, les Soviétiques aidèrent certains pays africains (l’Angola, le Mozambique, la Namibie, la Guinée Bissau, l’Afrique du Sud) à chasser le colonisateur. Et d’un.
De deux, la Fédération russe, qui a succédé à l’URSS, possède une bonne quantité des ressources naturelles pour lesquelles les Européens veulent exterminer les Africains. Même si elle ne fait pas du bénévolat en Afrique, elle serait moins gourmande que ceux qui pendant des décennies ont exploité l’uranium du Niger sans rien faire pour les Nigériens.
Troisièmement, d’aucuns souhaitent que les Africains comptent sur eux-mêmes. Soit mais quel pays africain s’est-il déjà libéré tout seul de la France?
Enfin, la Russie a-t-elle adopté le mariage entre personnes de même sexe? Ne connaissons-nous pas les pays qui sont favorables à cette pratique et qui veulent l’imposer aux Africains?
L’argument selon lequel les Russes esclavagiseraient les Africains et pilleraient leurs matières premières ne tient donc pas la route. Il est simplement révélateur d’un mal dont souffrent certains Africains: la peur de s’assumer, l’incapacité à s’affranchir d’un pays qui les domine et les opprime depuis longtemps, la difficulté à prendre leur destin en main. Ces Africains, qui semblent préférer l’esclavage à la liberté, sont semblables aux hommes qui vivent dans l’obscurité et qui n’imaginent pas l’existence d’autre chose. L’allégorie de la caverne de Platon présente en effet “des hommes enchaînés qui ne connaissent que les ombres projetées sur les murs de leur caverne par un feu allumé derrière eux”. Si l’un d’entre eux découvre la lumière et annonce aux autres que la vie est meilleure dehors, il se heurtera à leur incompréhension, voire à leur hostilité, parce que cette annonce les bouscule dans le confort de leurs habitudes, ajoute Platon (cf. “La République”, Livre VII).
Ceux qui pensent qu’une alliance avec la Russsie est une mauvaise idée ont tout simplement peur de couper le cordon ombilical qui nous relie à la nuisible et hypocrite France.
Vladimir Poutine n’a jamais dit qu’il voulait s’immiscer dans les affaires des pays africains, leur donner des leçons de démocratie ou de bonne gouvernance. Les pays qui aiment moraliser les autres tout en faisant l’inverse, ceux qui valident les coups d’État et troisièmes mandats ici mais les condamnent là-bas, ceux qui encouragent les Africains à discuter avec les rebelles et terroristes tout en leur faisant la guerre chez eux, on les connaît.
Persister à avoir des relations avec un pays qui nous fait tourner en rond depuis 1960 n’a aucun sens. Ce qui aurait du sens, c’est que l’ennemi de nos ennemis devienne notre ami. Ce qu’il faudrait, c’est que d’autres dirigeants de l’Afrique dite francophone emboîtent rapidement le pas à Faustin-Archange Touadéra, Assimi Goïta, Ibrahim Traoré et Abdourahamane Tiani en signant des accords militaires avec la Russie de Poutine. Car, sans force militaire, il est illusoire de penser que nous pourrons construire nos pays et jouir tranquillement des richesses que Dieu nous a données et pour lesquelles on veut nous tuer par toutes sortes de moyens.
Jean-Claude Djéréké