L’homme parle le langage des écrivains qu’on a appelé les Classiques sous les rois de France. Il n’est pas Rabelais, Montaigne, La Fontaine… Il est au bas mot Togolais et kabyè. Le seul classique à mes yeux. Pour parler comme le philosophe Pline, il a des vers et des mots éclairs. Derrière ces vers se cache la plume d’un poète. Un poète que j’aime lire. Ici, il nous parle du Chancelier. Qui est ce chancelier ? Qui est cette Grande Croix de l’Ordre Cinquantenaire des Eléphants blancs au Togo ? Sous les apparats d’un naïf poète, c’est ce message ô combien grandiloque qui nous traverse tout le corps, la moelle épinière qu’il faut déchiffrer au prix d’un goût à la lecture, à la poésie. Jaurès, c’est ce quidam encerclé par la soldatesque et conduit manu-militari au cachot du prince. Son tort, avoir eu pour cousin Kpatcha Gnassingbé. La colère est parfois lente et elle s’exerce sous plusieurs formes. Camus Ali
Le parapluie du chancelier
Il s’en va.
Veule, aux pas feutrés
Sa longue robe de coton sergé émerisé
Décorée désormais aux Armoiries Nationales
Embarqué dans l’immunité à vie
Ce Richelieu au sourire charitable
Débarque pour sa survie
Au paradis des intouchables
Et pourtant…
Chevalier de l’Ordre Total du Saint Or Noir
Officier de l’Ordre Général des Miniers
Grand Officier de l’Ordre National des Florentins Argentiers
Chancelier à vie de l’Échiquier National
Et encore…
Grand Voïvode de la Voïvodie Énergétique du Togo
Commandeur de l’Ordre Suprême des Marins en Eau Profonde
Grand Officier de l’Ordre du Mérite des Emplois Supérieurs de l’État
Grand Croix de l’Ordre Cinquantenaire des Éléphants Blancs du Togo
Pire…
Plus Grand Commun Diviseur de la Famille Nationale
Conservateur Général de la Fraternité des Prisons
Palme d’Or des steriles negociations
Régent de l’Ordre Eternel de la République du Qui-Perd-Gagne
Tout au fond de ta pénombre
Brillent les manteaux de l’immunité
Et de ton éternelle responsabilité
Ô Homme sans Ombre…
Jaurès Tcheou, De Irato Scriba, 2020