La Cour pénale internationale (CPI) a « légitimé » la mise en place d’une justice partiale contre l’ex-président Laurent Gbagbo et ses proches en Côte d’Ivoire après la crise post-électorale qui a fait plus de 3.000 morts, a dénoncé jeudi Human Rights Watch (HRW).
L’organisation de défense des droits de l’Homme souligne dans un rapport que la Cour n’a délivré publiquement que deux mandats d’arrêt, à l’encontre de Laurent Gbagbo et de son épouse Simone, tous deux accusés de crimes contre l’humanité pendant les violences post-électorales de 2010-2011.
HRW appelle la CPI « à rapidement enquêter sur les crimes commis par des individus appartenant au camp (du président Alassane) Ouattara pour rétablir sa « légitimité ».
En effet, sur « plus de 150 personnes qui ont été inculpées pour des crimes perpétrées lors des violences post-électorales, aucun des inculpés ne provient des forces pro-Ouattara », souligne le rapport d’HRW, relevant « les efforts inégaux déployés par la Côte d’Ivoire pour réclamer des comptes aux responsables des crimes internationaux graves » commis pendant la période.
« L’approche à sens unique adoptée par la CPI a légitimé la mise en oeuvre de la même approche par les autorités judiciaires ivoiriennes et porté atteinte à l’image en Côte d’Ivoire de la CPI en tant qu’institution impartiale », estime l’ONG dans son rapport de 82 pages, intitulé « Transformer les discours en réalité: l’heure de réclamer des comptes pour les crimes internationaux graves perpétrés en Côte d’Ivoire »
Pour HRW, le gouvernement ivoirien n’a pas encore honoré sa promesse de réclamer des comptes de manière impartiale pour les crimes internationaux graves.
« Si la Côte d’Ivoire veut rompre avec son dangereux héritage qui permet aux personnes proches du gouvernement d’être à l’abri de la justice, il faut qu’elle engage des poursuites crédibles à l’encontre des responsables de crimes appartenant aux deux camps impliqués dans le conflit post-électoral », avertit l’ONG.
Or, si le chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara clame régulièrement son refus de « l’impunité » et d’une « justice des vainqueurs », il n’a pas jusqu’à présent démontré son intention d’inquiéter ses soutiens.
Premier ex-chef d’Etat remis à la CPI, Laurent Gbagbo, 67 ans, est soupçonné d’être « co-auteur indirect » de quatre chefs de crimes contre l’humanité.
Fin novembre, la Cour a rendu public un mandat d’arrêt contre Simone Gbagbo
mais le gouvernement ivoirien n’a pas encore indiqué s’il la livrerait, assurant que la justice locale est désormais capable de traiter les dossiers liés à la crise de 2010-2011.
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