Madame a raflé la vedette en rentrant en Airbus, avec quelques 250 investisseurs potentiels, qui bien sur se seront engagés potentiellement « Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer ». Le déplacement de ce monstre des airs n’a même pas été rentabilisé puisque,sur ces plus de 800 places, la cour de Dominique et les investisseurs invités aux frais du contribuable ivoirien n’auront occupé que 516 sièges.
Notre époux de la première Dame sera donc rentré plus discrètement, avec un ou deux engins volants de la Magellan Airlines, son hôpital volant de campagne, son personnel et ses deux médecins français. Un article de Nord Sud, peu convainquant nous assure que Ouattara a délégué son premier ministre auprès du Forum Investir, aussi bon que lui, peut-être même meilleur. S’il s’était agit d’un jeune, d’un poulain à adouber, nous aurions pu accepter cette version, mais cette raison est nulle et non avenue, car Ouattara, en mal d’affection, très peu acclamé par les Ivoiriens qui n’ont pas voté pour lui, et beaucoup d’autres qui ont rejoint le camp de la grogne « Gbagbo Kafissa », aime à se mettre du baume au coeur, quand il peut être chaleureusement entouré par ses amis du monde de la finance internationale, qui lui serinent qu’il est ce président exceptionnel qui va nous faire entrer tel le messie dans le deuxième miracle économique d’une Côte d’Ivoire des mille et une nuits.
Pensez donc, lorsque le président Gbagbo a été chassé, il y avait 3 millions de chômeurs, maintenant les choses se sont améliorées: selon les statistiques gouvernementales, il y en aurait sept millions, et même avec son million d’emplois en cinq ans, il sera difficile d’être crédible pour les Ivoiriens alphabétisés, heureusement non rattrapés. Alors oui, ces « investisseurs », c’était autant d’amis, de flatteurs, de cajoleurs dans le sens su poil, et il se serait abstenu de les rencontrer? Les mauvaises langues interprétant son absence également au sommet de l’Union Africaine parce qu’il serait malade, le gouvernement Duncan s’est empressé de lui organiser quelques petites entrevues express privées avec quatre investisseurs triés sur le volet, qu’il a reçus loin du bruit, loin de la foule, mais avec un photographe chargé de nous renvoyer l’image d’un président en pleine forme.
Revenons à notre Airbus, le scoop présidentiel de la nouvelle année, bien plus médiatisé que les libérations à doses homéopathiques des prisonniers politiques. Notre engin ne vient pas étoffer Air Côte d’Ivoire, il n’a pas été acheté par le gouvernement. Non, c’est un avion d’Air France, qui vient certainement apporter sa contribution au prochain dépôt de bilan d’Air Côte d’Ivoire. La Lettre du Continent du 29 janvier 2014 nous révèle qu’il ne faut plus subventionner Air Côte d’Ivoire: le FMI ne veut plus accorder de rallonge budgétaire (10 Millions de FCFA en 2013) à la flotte ivoirienne. Alors le général Abdoulaye Coulibaly, en bon pilote, face à une situation d’urgence, devra bien manœuvrer son siège éjectable au sein de l’entreprise.
Le spectacle donné à l’Ivoirien devant sa télévision, c’est que la Côte d’Ivoire avait attrapé la version 21ème siècle des rennes du Père Noël, et que tout un chargement d’hommes et de cadeaux en descendait à la suite de la première dame. Oui, Dame Dominique a dû bien roucouler pendant ce voyage, pensez donc, elle était la marraine du vol, et le gros Bébé Airbus a même été baptisé à l’arrivée, avec des canons à eau, alors que cette eau précieuse fait cruellement défaut dans bien des quartiers d’Abidjan. En se voyant presque capitaine de l’Airbus, cheffe de file de ces derniers investisseurs français inconscients ou tout simplement heureux d’avoir gagné un voyage « tous frais payés » dans ce pays émergeant, dont la croissance phénoménale selon l’AFP et repris par Libération, nous est rapportée dans ces termes à peine exagérés : « La Côte d’Ivoire, moins de trois années après la crise sanglante qui l’a ébranlée, connaît une croissance digne des tigres asiatiques ». .
Au hasard je reprend l’un des commentaires élogieux à l’endroit de la dame blonde sur sa page facebook où elle consigne tous les petits évènements qui lui valent des dizaines de courbettes de la part des dominos-moutons qui déversent à la pelle des flatteries sans aucune réflexion, probablement rémunérées une piécette pour chaque phrase retenue. « Un boing A 380, à son bord, 516 VIP, conduits par une dame, une grande dame, la 1ere dame de Côte d’Ivoire, accueillie par ses sœurs dont l’ex 1ere dame, Henriette parce qu’elles n’ont qu’une seule chose à cœur, le bonheur de la côte d’ivoire et de toute la population. Merci à vous mamans. » Bien sûr il n’y a aucun commentaire discordant, discourtois, « manquant d’élégance » selon la formule consacrée de son scribe patenté qui m’a repris il y a quelques jours, alors que j’égratignais quelque peu le mari de sa patronne.
Les voyages extérieurs ne sont donc pas ceux qui fatiguent le chef, ce sont les voyages intérieurs; Les flatteries passent plus difficilement, parce que plus le temps passe, plus les promesses doivent se réaliser. Nous sommes à la veille de la prochaine sortie du candidat Ouattara en campagne 2015 à Bondoukou; nous allons voir une nouvelle université sortir de terre comme un champignon fluorescent, qui accueillera déjà les étudiants de la rentrée académique d’automne.A cet agenda chargé, il faut rajouter la venue de François Hollande sur les bords de la lagune Ebrié, les 27 et 28 février, toujours selon la Lettre du Continent. Cette visite a été déjà reportée d’une quinzaine, mais nous ne savons qui de François ou de Dramane était débordé à cette date. Et puis on nous promet une nouvelle virée préélectorale en Vote d’Ivoire; cette fois-ci sur les traces du PDCI, dans la région de l’Ifou, chère au fumeur de cigares et grand spécialiste de champagne français.
Ah, ce cher Président: pour ne pas perturber la circulation ô combien difficile à Abidjan aux heures de pointe, il commencerait son travail très tôt et le terminerait après les autres, d’après des confidences recueillies par le journal Nord Sud…A l’heure ou certains prennent le chemin des boites de nuit, comme Hamed Bakayoko ou le fraichement promu lieutenant colonel Wattao, un FRCI digne, un militaire qui aime le contact des civils, un habitué des lieux où l’alcool et la petite musique de nuit coulent à flot, très à l’aise avec les jeunes dames qui savent dégrafer son pantalon-treillis, et plus si affinité, – certaines photos à l’appui -, notre Ado prolonge sa journée de travail et planche sur des problèmes, aux solutions difficiles, à plusieurs inconnues: milliards, milliards, où êtes-vous?
Tout va donc très bien, le bateau Côte d’Ivoire, -depuis son discours de fin d’année-, navigue gaillardement au dessus des chantiers qui ne nourrissent pas les Ivoiriens. Le président va bien, le gouvernement va bien, la justice va bien, l’économie va bien, les exilés vont bien, ils rentrent en masse, des milliers à gauche, des milliers à droite. Alors pourquoi vient-il de repartir d’urgence en France comme nous l’apprend connectionivoirienne?
Les ivoiriens sont-ils des enfants pour qu’on ne leur dise pas ce qui se passe? Non, il faut poursuivre le plan A comme Alassane, parce que le plan B n’est pas encore mûr, il n’y a personne de sérieusement valable dans la sphère rattrapée pour remplacer un Ouattara malade et dépassé. Ah, si nous étions en monarchie, son épouse aurait été parfaite pour assurer la régence, assurer la transition. Si madame Ouattara avait eu la peau moins blanche, elle aurait pu être le joker de la France, femme d’affaire confirmée, femme à poigne, ne craignant pas le sang versé; certains acteurs de la période dite « post électorale » assuraient même qu’elle aurait été le commendataire du meurtre d’IB. D’ailleurs, jamais ce régime n’a essayé de mettre sur le compte d’un proche du président Gbagbo le meurtre du chef du commando invisible, comme il n’a pas oser s’aventurer dans la recherche des meurtriers du professeur Philippe Rémond, ce professeur de l’Institut National Polytechnique FHB, qui avait pris fait et cause pour la politique du président Gbagbo et milité pour une monnaie africaine dégagée du joug français; il avait été assassiné à Yamoussoukro dans une chambre d’hôtel le 31 mars 2011.
Non tout va bien, le FPI est bien occupé à trouver ses repères, ses ténors donnent de la voix, même si je doute que dans le théâtre politique ivoirien il lui soit donné autre chose que quelques strapontins au « poulailler ».
La mort n’existant pas, nous sommes toujours à nos 3000 morts de la ladite « crise post électorale », rien ne s’est passé depuis, ni Duekoué, ni Nahibly, juste quelques femmes d’Abobo assassinées sur ordre de Laurent Gbagbo, et qui nous font passer à 3007 morts. Personne ne meurt, pas même Mahan Gahé et tous les autres anonymes qui croupissent encore dans les geôles du pays. Ouattara aussi est immortel, et bientôt il pourra après le costume d’académicien d’Outre-Mer, endosser celui de roi des dozos, bardé d’amulettes porte bonheur.
Alors, silence! « Selon nos informations le chef de l’État ivoirien Alassane Ouattara a quitté Abidjan en fin de matinée dimanche 2 février 2014, en direction de la France. Pour ce nouveau voyage en dehors de la Côte-d’Ivoire, Alassane Ouattara était accompagné de son épouse Dominique Ouattara et d’une délégation réduite, selon nos sources. Aucune note officielle n’a encore filtré sur les raisons de cette sortie du numéro un ivoirien ». Ouattara a repris son bâton de pèlerin pour faire rentrer des fonds dans sa chère Côte d’Ivoire, et s’il est reparti en fin de matinée, aujourd’hui dimanche, c’est encore pour laisser les coudées plus franches à Kablan Duncan et son équipe, ce soir il a juste prévu une petite soirée entre intimes: Ouattara et son épouse, en bonne marraine de la petite Julia Sarkozy, ont répondu à son invitation: elle n’aurait pas voulu manger ses crêpes de la Chandeleur loin d’eux, loin de leur affection.
Ne nous inquiétons donc pas, si les crêpes passent bien, tout ce petit monde sera de retour à Abidjan, bientôt, pour des aventures encore plus palpitantes.
Shlomit Abel, 2 février 2014
Titre Lynx.info