Vidada a fait la connaissance d’Agbéyomé Kodjo en prison lorsqu’il était revenu pour aider Faure Gnassingbé et a été arrêté par les officiers supérieurs qui l’ont fait enfermer à la Prison civile de Kara.
Membre d’un réseau de trafic de drogue, Vidada était à l’époque dans cette prison à la fois comme un espion du régime RPT parmi les prisonniers et comme quelqu’un qu’on cachait à d’autres membres du réseau qui cherchaient à le tuer pour des différends entre eux. Son emprisonnement devait alors passer une punition pour le mettre à l’abri de ceux qui lui en voulaient.
Devenus amis, c’est là où Agbéyomé a fait la confidence à Vidada du parti qu’il allait créer à sa sortie.
A leur sortie, fut donc créé le parti Alliance avec Dahuku Péré.
Par la suite, le RPT qui avait peur de ce parti utilisera Vidada pour semer la zizanie entre Péré et Agbéyomé et réussira finalement à faire éclater le parti qu’Agbéyomé quittera pour aller fonder son nouveau parti OBUTS avec Vidada.
Après avoir créé OBUTS, la confiance entre Agbéyomé et Vidada amènera ce dernier à révéler à Agbéyomé comment Faure et Bodjona tentaient de le séduire pour le faire rentrer dans un réseau de trafic de drogue.
Agbéyomé le lui déconseilla en lui expliquant que ces jeunes-là (Faure et Bodjona) ne maîtrisaient rien du tout et qu’ils étaient des voyous qui allaient l’entraîner à avoir des problèmes, qu’il ne pourra pas s’en sortir parce qu’il n’était pas intellectuellement outillé ou suffisamment habile pour faire cette compagnie-là.
Il lui disait que les gens l’accusaient, lui Agbéyomé, d’avoir volé l’argent public de l’état pour s’enrichir alors que c’est faux parce qu’il n’a jamais volé cet argent mais avait fait en réalité ce trafic de drogue avec Eyadéma qui l’envoyait en mission pour cela et c’est comme ça qu’il a pu s’enrichir.
A son retour de mission, il recevait sa quote-part en tant que convoyeur ou coursier mais c’est Eyadéma qui faisait partie d’un grand réseau de très hautes personnalités dans lequel il était un chef qui maîtrisait la situation et savait comment faire les choses.
Donc, s’il ne fait pas attention, ces petits-là (Faure-Bodjona) qui ne savent rien de tout cela vont l’entraîner dans des problèmes parce qu’ils se sont précipités dans les choses sans rien savoir de comment on fait parce qu’ils ne sont que des voyous.
Agbéyomé ne saura pas par la suite s’il a continué ou non mais il avait tout simplement tenu à le prévenir.
Donc, l’affaire des 23millions qui a amené les problèmes qui ont finalement conduit à la mort de Vidada est qu’on l’a envoyé en mission de convoyage d’une cargaison de drogue et ces 23 millions étaient la quote-part qu’on devait lui payer pour ce service qu’il a rendu au réseau. Ce n’est donc pas 23 millions qu’on devait lui donner pour avoir créé les problèmes à Agbéyomé dans OBUTS comme on sait. Ça, c’est une affaire totalement différente qui n’a rien à voir avec cela.
Et c’est parce que Faure Gnassingbé qui devait lui remettre cet argent ne voulait pas le faire lui-même pour compromettre sa position à la présidence qu’il a remis cet argent à Bodjona pour le lui remettre.
Mais lorsqu’il a été envoyé pour retirer l’argent chez Bodjona, celui-ci ne lui a donné que 150.000F CFA pensant qu’il ne savait rien du deal pour lequel il devait retirer l’argent.
Donc Vidada se fâcha et appela Faure pour demander à le voir à la présidence où il lui révéla l’escroquerie dont il avait été victime de la part de Bodjona. Immédiatement devant lui, Faure appela Bodjona et lui dit tout simplement qu’il avait Vidada devant lui. Bodjona se mit à paniquer en bafouillant des explications qui ne tenaient pas debout, finissant par dire que c’est un malentendu et qu’il fallait qu’il vienne au bureau pour qu’ils règlent ça.
Lorsque Vidada alla voir Bodjona, il ne discuta plus rien avec lui et lui remit tout simplement ses 23 millions au nom du réseau dont faisait partie notamment Faure, Bodjona et Titikpina mais il lui avait remis l’argent avec colère parce que Vidada l’avait démasqué aux yeux du membre du réseau qui est Faure.
Donc c’est là où Vidada, lorsque alla rendre compte à Faure qu’il avait bien reçu l’argent, en profita pour lui faire des révélations sur des informations qu’il avait surprises entre Bodjona et Titikpina indiquant qu’ils se préparaient à lui faire un coup d’état. Il lui avait fait ces révélations par souci de bénéficier désormais de sa protection à lui Faure, sachant qu’il venait de se mettre à dos à jamais le tandem Bodjona-Titikpina dans le réseau. Mais en donnant ces informations à Faure, il pensait aussi que ce dernier allait les garder secrètes en sachant comment faire pour se protéger désormais à partir de là mais Faure appela immédiatement Bodjona et Titikpina pour leur demander ce qu’il leur avait fait pour qu’ils cherchent à le tuer et les supplia de ne pas le tuer. Après cet appel il a dû prendre des mesures contre eux.
C’est ce qui a amené les journalistes à constater que tout se passait depuis quelques temps comme si Bodjona était dans de mauvais draps sans qu’on sache pourquoi au point où il ne suivait même plus certains conseils des ministres.
C’est ce qui explique aussi pourquoi Titikpina a été enlevé du Ministère de la Sécurité pour être mis à l’Etat-major où, non seulement il n’a plus de commandement mais d’où toutes les armes ont été enlevées pour être stockées à la présidence, tout cela pour qu’il ne puisse plus avoir les moyens de faire un coup d’état.
On était donc dans cette situation quand il y a eu l’assassinat de Vidada qu’il faut simplement comprendre comme une vengeance du groupe Bodjona-Titikpina contre Vidada pour sa trahison de leurs plans.
Sur l’assassinat :
Comme l’ont dit les journaux, ce soir-là, Vidada était rentré en voiture avant de ressortir à moto.
En fait il était parti acheter des brochettes et du vin.
Il devait ensuite recevoir un coup de fil suite auquel il alla ouvrir son portail à des gens parmi lesquels on sait qu’il y a une femme. En effet les gens du quartier de Vidada disent que ses assassins sont venus dans une voiture à trois : une femme et deux hommes qui téléphonaient au portail alors que Vidada était venu leur ouvrir pour les faire entrer avant de refermer le portail derrière eux.
Ceci laisse penser que c’est parce qu’il avait reçu un premier coup de fil de la même femme (ou homme) qu’il était sorti pour aller acheter les brochettes et le vin pour recevoir donc ces invités ou visiteurs.
D’ailleurs actuellement pour l’enquête, il doit être très facile à la Police de connaître le numéro du portable de Vidada et d’obtenir de Togocellulaire ou de Moov chez qui Vidada a pris son abonnement, le dernier numéro de portable d’où il a été appelé pour connaître immédiatement au moins un de ses tueurs qui doit pouvoir dire qui sont les deux autres. Sinon, c’est qu’on ne veut pas le savoir parce qu’on sait très bien qui il y a derrière son assassinat.
C’est justement ce qu’on doit se demander depuis qu’on a appris par la suite que le téléphone de Vidada qui a été récupéré par la Police a permis d’arrêter deux de ses assassins qui étaient détenus à la DPJ mais que l’un d’entre eux s’est échappé lorsque le commissaire qui s’occupe de l’affaire l’a fait sortir de sa cellule pour l’interroger. Comment est-ce possible ? Ne l’a-t-on pas fait fuir sciemment pour étouffer l’affaire afin que les vrais commanditaires de cet assassinat ne soient pas retrouvés ?
Toujours est-il que, comme Vidada avait l’habitude de recevoir des amis ainsi, cela n’étonna pas les gens du quartier vu surtout la publicité qu’il s’était faite et la terreur qu’il faisait régner autour de sa maison parce qu’il n’acceptait pas qu’on reste devant son portail ou sous ses murs.
Les gens du quartier ne s’en étonnèrent donc pas jusqu’aux environs de 2 heures – 3 heures du matin où ils se mirent à entendre les bruits d’une dispute au domicile de Vidada suivie quelques temps après par des coups de feu.
Puis ils entendirent une voiture démarrer qui était donc celle des amis qui étaient venus voir Vidada.
Vu le comportement que Vidada avait vis-à-vis des gens du quartier, ceux-ci n’osèrent pas, au lever du jour, aller chercher à savoir ce qui s’était passé chez lui, pour éviter de se faire envoyer promener mais ils se jetaient des regards croisés en attendant de voir ce qui allait se passer, toute la journée durant parce que des fois Vidada lui-même s’enfermait à la maison toute la journée sans sortir.
Finalement, les gens du quartier se sont résolus à appeler le père de Vidada qui venait bien sûr voir son fils de temps en temps et dont certains avaient pu avoir le numéro, pour lui rapporter ce qui s’était passé dans la nuit et lui demander de venir voir sur place si rien n’était arrivé à son fils.
Lorsque le Papa arriva, il sonna longuement au portail sans avoir de réponse. Puis il demanda aux gens du quartier de lui apporter une chaise pour qu’il monte dessus afin de voir par-dessus le mur de clôture l’intérieur de la maison. Et lorsqu’il monta sur la chaise il eut le choc de voir son fils juste derrière le portail où il avait été traîné depuis le salon où il avait été tué au préalable. Pourquoi donc le communiqué du procureur de la République par intérim lu par la suite à la Télévision nationale a menti en disant qu’après la découverte du cadavre de Gaston Vidada « le chef du Service de recherches et d’investigations s’est transporté sur les lieux où le corps de la victime a été découvert dans son salon gisant dans son sang visiblement, criblé de balles » ?
Sous l’effet de la chaleur, son corps qui était resté au soleil toute la journée avait beaucoup gonflé donc s’était déjà pas mal décomposé.
Le père redescendit de la chaise avec beaucoup de chagrin et les gens du quartier commencèrent à monter sur le mur pour voir à leur tour le triste spectacle. Mais on a interdit à tout le monde d’entrer dans la maison parce qu’on avait appelé la Police qui est venue avec un huissier faire les constats d’usage.
Puis on a enroulé le corps dans un de ses pagnes puis dans un sac plastique pour aller le déposer à la morgue.
A l’affaire Vidada, il faut ajouter une autre, très étrange, dont on a peu parlé et qui s’est passée la même nuit chez un certain Monsieur Blaodékissi Paulin, dans le même quartier Agbékovi où habite Vidada, près de la frontière du Ghana.
Chez ce monsieur qui est revenu d’Europe monter la société de gardiennage Le Regard, les bandits sont arrivés dans la nuit profonde vers les 3 heures du matin, c’est-à-dire certainement après Vidada.
Après être entrés chez lui, sans rien lui demander, ils lui ont tiré dessus des balles qui lui ont cassé le haut du bras, vers l’épaule.
Admis à la Policlinelle Wossinou Gbogbo du Dr Quakoe au quartier Ave-Maria d’Adidogomé, on s’interroge sur cette sombre affaire qui reste un mystère complet.
Est-ce de la même affaire de drogue qui a causé la mort de Vidada dont il s’agit et aurait-on voulu donner un avertissement à ce monsieur en le blessant simplement sans le tuer pour lui imposer la loi du silence qui prévaut dans ce milieu ?
Car on sait que les sociétés de gardiennage qui sont généralement des officines de renseignements et de toutes sortes de trafics occultes sont souvent impliquées en Afrique dans ces histoires de trafic de drogue dans laquelle sont mouillés nombre de chefs d’états africains et officiers des armées de leurs pays comme on l’a vu de façon rocambolesque en Guinée Bissau et en Guinée sous Lansana Conté.
Il est curieux en effet de voir qu’au même moment où il y a cette ténébreuse affaire, il y a aussi sur la place celle d’Agba Bertin, le PDG de la société de gardiennage OPS Sécurité qui a été arrêté et torturé à l’ANR, contrôlée par le Commandant Yotroféi Massina pour les besoins de Faure Gnassingbé, parce qu’on lui reproche d’être impliqué dans toutes sortes de trafics mafieux. Mais on sait aussi qu’on l’a torturé parce qu’il refusait d’impliquer Bodjona comme on le lui demandait pour qu’on l’arrête aussi soit disant parce qu’il était impliqué dans cette affaire d’escroquerie d’un milliardaire saoudien qu’on lui avait collé. On doit alors se demander s’il ne s’agit pas en réalité de cette affaire de trafic de drogue qui a dégénéré pour démasquer une affaire de coup d’état.
Donc avec les affaires Vidada, Monsieur Blaodékissi Paulin et Agba Bertin : s’agit-il de trois épisodes des mêmes règlements de compte au sein de réseaux d’état de trafic de drogue ? C’est la question qu’il faut d’autant plus se poser aujourd’hui qu’on vient d’apprendre que les balles qui ont tué Vidada proviennent d’un type d’arme que seuls 6 (six) officiers supérieurs de l’armée togolaise possèdent ici au Togo. Qui sont-ils et quels liens directs ou indirects peut-on trouver à l’un ou à plusieurs d’entre eux avec Vidada ? A-t-on fait une enquête balistique sur chacune de leurs armes pour savoir si l’une d’entre elles a récemment tiré une balle ? Si la réponse est non on peut alors poser une autre question : POURQUOI ?
Albert Djingui