Certains faits d’actualité ont la particularité de nous replonger dans une histoire douloureuse. Ainsi de l’interpellation à Dakar de l’activiste et chroniqueur de presse Kemi Seba.
Certains faits d’actualité ont la particularité de nous replonger dans une histoire douloureuse. Ainsi de l’interpellation à Dakar de l’activiste et chroniqueur de presse Kemi Seba.
Selon ce dernier et ses proches, tout serait parti d’une plainte de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest. Le 19 août dernier, Kemi Seba avait publiquement brûlé un billet de 5000 FCFA, pour protester contre ce qu’il considère comme une monnaie néocoloniale.
Certes. On ne peut nier que la destruction de billets de monnaie est un délit selon le Code pénal sénégalais. Mais il est évident qu’en fonçant tête baissée sur Kemi Seba, l’Etat sénégalais et (si les accusations se confirment) la BCEAO posent un acte politique. En effet, le ministère public choisit de poursuivre ou de ne pas poursuivre.
On se souvient irrésistiblement du mois de septembre 2003 et du casse des agences de la BCEAO de Bouaké et de Korhogo, en Côte d’Ivoire. Des rapports internes avaient alors désigné Guillaume Soro et les « comzones » de sa rébellion armée comme les responsables de ce forfait. Des sources bien informées avaient révélé que l’argent de ce « casse » avait été blanchi à Dakar. Mais la BCEAO et l’Etat du Sénégal avaient choisi de regarder ailleurs. Comme si elles acceptaient de payer ainsi leur cotisation à une insurrection dont l’objectif était de renverser Laurent Gbagbo, dont la France avait juré la perte.
Comment ne pas le noter ? L’inaction d’hier allait dans le sens des options stratégiques de l’ancienne puissance colonisatrice. Et l’activisme judiciaire d’aujourd’hui va dans le sens de la protection du statu quo néocolonial.
L’Afrique francophone dirigeante, cuite à la sauce CFA est incapable de réflexion
L’Etat du Sénégal et peut-être la BCEAO ont posé un acte politique. Mais il s’agit également d’une erreur politique. Quand on est à ce point fort avec les faibles et faible avec les forts, on suscite une indignation qui renforce paradoxalement ceux que l’on veut combattre. En effet, nul n’est besoin d’être pro Kemi Seba pour se dire aujourd’hui qu’il y a décidément quelque chose de pourri au royaume de Françafrique.
Théophile Kouamouo
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