En 64 ans, les États africains auront probablement dépensé au moins 33,280 milliards de FCFA pour célébrer des indépendances qui n’ont jamais, en réalité, eu lieu. Pendant toutes ces années, l’Afrique a dansé, chanté et réquisitionné ses armées pour défilé, sans contrainte, sur les vestiges de la colonisation. Pourtant, ses états manquent de presque tout et dans tous les domaines. Pourtant, ce continent traine encore dans la périphérie de l’économie mondiale. Et l’index de son développement Humain est le plus bas au monde. Face à ce paradoxe, la question qui nous titille l’esprit est la suivante: Et si l’Afrique mettait fin à l’organisation de ces fêtes post-coloniales et utilisait l’argent des célébrations à venir pour accélérer son développement ?
L’Afrique compte 54 États. Parmi eux, il y a 52 ex-colonies dont les souverainetés nationales ont été reconnues par l’ONU. Les deux autres pays restants, l’Éthiopie et le Libéria, n’ont pas été colonisés. Même si la plupart des états ont acquis leurs souveraineté dans les années 1960s, d’autres par contre ont proclamé leurs indépendance longtemps après. C’est le cas la Namibie en 1993.
Etant donné que notre réflexion tourne autour des dépenses liées à l’organisation des fêtes d’indépendance sur notre continent, nous n’allons donc pas prendre en compte l’Ethiopie et le Libéria. À ces deux pays nous ajoutons le Sahara Occidental qui est un État dont la souveraineté n’est pas encore reconnue par la communauté internationale. Ce sont donc 52 pays sur 54 qui feront l’objet de notre analyse ici.
Chaque année, chacune des 52 ex-colonies de notre continent célèbrent la fête d’indépendance à la date de son accession à la souveraineté nationale. Pour cela des milliards de Fcfa de leurs contribuables nationaux sont dépensés dans une opacité déconcertante. Pourtant ces états ont tous le statut de pays en voie de développement. Et, de ce fait, beaucoup d’entre eux dependent, dans nombre de cas, des aides extérieures. Même sur des projets continentaux, nous états mis ensemble n’arrivent toujours pas à prendre leurs responsabilités. À preuve, le siège de l’institution continentale, Union Africaine, aurait été construit avec des fonds extérieurs.
Dans ce cas précis, pourquoi les états africains n’ont-ils pas été capables de financer eux-mêmes la construction de ce siège ? Est-ce par manque de volonté politique ou simplement parce qu’ils n’ont pas été capable de réunir les moyens nécessaires pour financer le projet ? À notre avis c’est par manque d’argent. Pourtant, nous savons tous que la main qui donne est toujours celle qui ordonne. Et c’est encore plus vrai en relation internationale que dans la vie de tous les toujours. Il est évident que si cette institution continentale était financée par les africains, eux-mêmes, elle jouirait d’une grande indépendance vis-à-vis de l’extérieur. Et cela lui permettrait d’être plus impartial dans la gestion des conflits sur le continent.
Pour voir à quel point ces fêtes du colonialisme ont contribué au maintien de notre continent dans le sous-développement, jetons ensemble un regard sur les fonds engloutis dans l’organisation de leurs célébrations dans les 52 États pendant les 60 dernières années. Par manque de chiffres officiels – il n’y a jamais eu de transparence dans l’organisation de ses fêtes – nous nous sommes permis d’affecter la somme de 10 milliards de fcfa à chaque état sans tenir compte de leur taille ou leur capacité financière. Nous précisons que ce montant a été choisi à titre d’exemple pour illustrer notre analyse. Il ne provient d’aucune source officielle.
Alors, si chaque ex-colonie décaisse 10 milliards de fcfa par an pour organiser sa fête d’indépendance, pour l’ensemble de 52 pays, ce sont au total 520 milliards de fcfa qui sortent des caisses publiques tous les 12 mois. Multiplions maintenant ces 520 milliards par 64 ans. Voici ce que donne le calcul : 33,280 milliards de fcfa. Wahooo !
Pendant plusieurs décennies, nos dirigeants ont dépensé à peu prêt cette énorme somme d’argent du contribuable africain pour célébrer le départ du colon du continent noir. Alors que tous les chefs d’État africains qui se sont succédés à la tête de nos pays depuis les années 1960s savaient bien que le colonisateur n’avait pas encore quitté notre continent. Si les Anglais, les Portugais, les Belges, les Allemands et les Hollandais sont restés un peu plus discrets et ont marqué une certaine distance vis à vis de leurs anciennes colonies après les indépendances, les français, quant à eux, ont été omniprésents dans leur ancienne zone d’influence. Et, ils y ont même instauré ce que Houphouët Boigny a dénommé la Françafrique, un système de prédation, pernicieux et profondément vicieux. C’est un tel système criminel à la limite que le président français Charles de Gauche avait soigneusement mis en place pour que la France parte sans jamais bouger du continent. Et que ses agents occupent, le plus longtemps possible, les couloirs des palais présidentielles des pays dits francophones.
Don’t get me wrong, ce que nous dénonçons ici, ce n’est pas l’indépendance en tant que telle, mais l’argent que les états continuent de dépenser pour la célébrer. Et le fait de rappeler aux peuples africains, 52 fois dans l’année, les souffrances que leurs ancêtres ont endurées. Nous voyons cela comme l’œuvre du colonisateur. C’est une manipulation des masses africaines à travers leurs propres chefs d’états pour maintenir les chaînes de la dépendance dans leurs esprits. En stimulant chaque année dans nos cerveaux les conséquences psyc
Que nos critiques viennent nous dire à quoi servent réellement ces célébrations en répondant à cette question importante: Que gagne notre continent a nous rappeler presqu’une fois par semaine que nos parents ont été humiliés, violés, violentés et même tués par les colons, et que c’est après des luttes sanglantes que les survivants ont réussi à faire accéder nos états à ce semblant d’indépendance?
Certains me répondront que ces célébrations font partie de l’histoire de notre continent. Et, qu’il est important de la rappeler. D’autres affirmeront que nos entrepreneurs locaux en tirent profit chaque année à travers la réalisation de contrats d’affaires qui accroissent leurs chiffres annuels.
Certes, tout cela sonne bien, mais ce n’est pas assez pertinent. L’argument de ceux qui mettent en avant l’importance historique de ces fêtes coloniales ne tient pas compte, ou à la limite, méprisent l’impact psychologique des rappels historiques
On ne le dira jamais assez, ces célébrations sont la symbolique de la domination d’une race sur une autre. Les noirs en ont souffert. Le peu de survivants qui ont connu cette époque douloureuse en souffre encore. Et ceux comme nous qui sommes de l’époque post-coloniale traînent aussi les mêmes stigmates. Ces rappels incessants continuent de développer en nous ce complexe qui fait croire à l’Homme noir que tout ce qui vient de l’occident est bon et ce est en Afrique est mauvais. C’est pourquoi nous nous indignons.
Ceux qui soutiennent ces fêtes pour des motifs liés aux dividendes financiers et/ou économiques ne savent pas que les pertes réalisées par les contribuables sont bien plus importantes que les bénéfices que tirent certains entrepreneurs locaux de l’organisation de ces festivités. C’est d’ailleurs pourquoi les chefs d’Etats ne s’y opposent pas. Parce que ces célébrations donnent l’occasion à certains d’entre eux de faire des surfacturations pour gagner beaucoup d’argent. Pour tout dire, les sommes détournées sont bien plus importantes que les bénéfices que tirent les entrepreneurs locaux de l’organisation de ces fêtes.
Ce qui nous peine également est le fait que c’est encore les ex colonies qui dépensent
De notre côté, puisque cette histoire coloniale ne nous réjouit pas, on aurait pu organiser des conférences dans les écoles et universités et autres endroits publics pour en parler aux élèves et étudiants et à tous ceux qui le désire. Mais pas imposer cette période triste de notre histoire a tout le monde et endetter les pays pour le faire.
En conclusion
Si les dirigeants africains qui se sont succédés à la tête de nos états depuis 1960 avaient annulé la célébration de l’indépendance, et rassemblé ces fonds pour réaliser des projets de développement sur le continent, une partie des 31,2000 milliards aurait permis :
1- la construction d’une grande université africaine d’élite de la dimension de Oxford University, University of Cambridge, Stanford University ou Harvard University.
2- la construction et le financement d’un grand institut africain de recherche dans les domaines agricole, minier, énergétique, aéronautique, des technologies de l’information et de la communication, de l’intelligence artificielle etc…
– la construction sur fonds propres du Siège de l’Union Africaine et le financement de son fonctionnement;
– la construction des différents sièges des organisations sous-régionales telles que le CEDEAO, la CEEAC etc…et le financement de leurs fonctionnements;
– la construction de grandes infrastructures routières et ferroviaires pour relier toutes les capitales africaines;
– le maintien en compétition de la compagnie aérienne continentale Air Afrique;
– la construction de 5 grands centres hospitaliers universitaires ultramodernes en raison d’un hôpital par sous-région ( Afrique du Nord, Afrique du Sud, Afrique de l’ouest, Afrique de l’Est et l’Afrique Centrale). Ce qui permettrait aux élites africaines de se soigner en Afrique;
Etc…. Au plan psychologique, l’annulation de ses fêtes aurait permis d’effacer de nos mémoires l’image d’un peuple noir inférieur aux autres races. Et celle d’une Afrique pauvre et moins compétitive. J’invite les peuples africains à approfondir cette réflexion sur l’annulation des fêtes de l’indépendance sur notre Afrique.
Arsène Gnakouri Dogba